Moqué et stigmatisé en France, le discours de Ségolène Royal à Dakar demandant le pardon est salué en Afrique.
Qu'elle séjourne à Dakar ou aux Antilles, Ségolène Royal ne laisse pas indifférent. Le 6 avril dès le premier jour de sa visite dans le pays où elle a vu le jour il y a 55 ans la dirigeante socialiste a demandé «pardon à l'Afrique pour les propos prononcés par le président français lors d'une visite à Dakar en juillet 2007.»
«Pardon, pardon, pour ces paroles humiliantes et qui n'auraient jamais dû être prononcées -et je vous le dis en confidence - qui n'engagent ni la France, ni les Français» a-t-elle déclaré au siège du parti socialiste sénégalais.
En 2007, Nicolas Sarkozy avait notamment déclaré que «l'homme africain n'était pas suffisamment entré dans l'histoire». Des propos qui avaient provoqué un tollé sur le continent noir, notamment parmi les intellectuels.
Ségolène Royal ne s'est pas contentée de revenir sur ce discours très contesté. Elle a aussi déclaré : «La France républicaine mérite que cesse ce qu'on appelle la «Françafrique» et l'opacité des décisions prises dans le secret de quelques bureaux pour quelques intérêts particuliers» a-t-elle déclaré avant d'ajouter : «Nous ne pouvons, nous Français, ni soutenir les dictatures, ni abandonner les démocrates».
Aussitôt la nouvelle sortie de Royal a provoqué des réactions virulentes dans le camp présidentiel. Alain Joyandet, le secrétaire d'Etat à la coopération a répliqué : «Les déclarations de Madame Royal tenues à l'étranger sont choquantes, irresponsables et antidémocratiques. Elles sont tournées vers le passé».
Pour sa part Frédéric Lefebvre, le porte parole de l'UMP, affirme que de «la Chine à Dakar, en passant par Washington, Mme Royal ridiculise notre pays, par son attitude et ses sorties iconoclastes».
Pourtant vu d'Afrique, ce discours ne fait pas figure de nouvelle gaffe. Bien au contraire, il séduit et traduit selon nombre d'observateurs un excellent sens politique. Beaucoup d'Africains considèrent qu'elle a attaqué -au bon moment - l'un des points faibles de Sarkozy à savoir sa politique africaine et au-delà sa vision du continent noir. Selon le quotidien Dakar Soir : «La bataille de Dakar a donc bien eu lieu. La capitale sénégalaise a servi de ring au Président français et à sa rivale malheureuse lors de la dernière élection. C'est là que se jouent les prolongations. Après l'hallucinant discours de Dakar où Sarkozy n'avait pas craint de véhiculer les pires clichés du racisme à l'encontre des Africains, l'occasion était tentante pour l'ex-Madone des sondages de prendre son exact contre-pied».
La déclaration de Royal intervient quelques jours à peine après la visite du président français en Afrique. Une tournée contestée sur le continent noir : Sarkozy étant accusé par nombre de médias de se préoccuper surtout des intérêts des grandes entreprises françaises. Alors qu'il visitait Niamey, Areva signait un contrat très important pour l'exploitation de l'uranium du Niger. Cet accord était loin d'aller de soi, les Chinois étant aussi sur les rangs. La visite à Brazzaville intervenait dans un contexte tout aussi économique, le groupe Bolloré ayant obtenu la gestion du port de Pointe Noire.
Le discours de Royal appelant à la mise à bas de la Françafrique intervient à un moment où le président français est accusé de très bien s'accommoder d'un système qu'il avait tant dénoncé par le passé. Les propos «antifrançafrique» de la socialiste font étrangement échos à ceux tenus avant l'élection présidentielle par un certain... Nicolas Sarkozy. De quoi faire enrager l'Elysée.
Autre habileté de Ségolène Royal, elle affronte son rival sur un terrain qui lui est favorable. D'une certaine façon pour reprendre un terme footballistique, elle joue à domicile. Native du Sénégal où son père était militaire, elle se présente d'ailleurs dans son discours comme une «fille de l'Afrique». Et elle est perçue comme telle par nombre d'Africains, fiers qu'une femme ayant vu le jour sur le sol Sénégalais soit devenue une personnalité politique de premier plan en France, le pays qui reste la référence au Sénégal.
D'autre part, sa popularité est inversement proportionnelle à l'impopularité du Chef de l'Etat français au Sénégal. Les intellectuels retiennent l'homme du discours de Dakar qui passe d'autant plus mal que les Sénégalais se rappellent de tous les sacrifices que leur pays a réalisé pour contribuer à la libération de la France. Et de «l'ingratitude d'une certaine France». Le massacre de Thiaroye -des soldats sénégalais assassinés en 1945 à leur retour au pays car ils demandaient le paiement de leurs arriérés de soldes- reste dans toutes mémoires.
Mais les milieux populaires considèrent surtout Sarkozy comme le responsable du durcissement de la politique migratoire. Un «crime de lèse majesté» dans un pays où la jeunesse est prête à monter dans des pateras pour rejoindre l'Europe.
Le discours de Royal en matière d'immigration est perçu comme beaucoup plus «généreux et solidaire». D'autre part, les Sénégalais friands d'images venues de Paris se rappellent que Royal a tenu tête à Sarkozy lors du débat qui a précédé la deuxième tour de la présidentielle.
«Elle est perçue comme la championne de l'Afrique, celle qui défend sa cause, et les valeurs traditionnelles de la France», explique le journaliste béninois, Marcus Boni Teiga qui ajoute : «Les Africains n'ont pas pardonné à Sarkozy d'avoir déclaré que la France n'avait pas besoin de l'Afrique. Surtout qu'il est venu le dire chez nous. Lors de son séjour à Cotonou, les autorités ont tout fait pour éviter les contacts avec la population. Sinon ça se serait mal passé. Les gens étaient très remontés. Un bain de foule à la Chirac aurait été difficilement imaginable».
Dès lors le contraste est saisissant entre «Ségo l'Africaine» et «Sarkozy le mal-aimé». D'ailleurs, selon Dakar Soir, l'Elysée appréhendait ce «retour au pays» : «Royal a dû se contenter de tenir son discours à la maison du parti socialiste. C'est qu'à l'Elysée, on s'est intéressé de très près à ce déplacement. A tel point que d'intenses lobbyings ont été opérés depuis Paris pour que l'ancienne compagne de François Holllande ne rencontre pas le Président Wade. La manœuvre semble avoir réussi car on a prétexté un problème d'agenda pour ne pas la recevoir». Le quotidien dakarois ajoute : «Quand on sait que Claude Guéant, le tout puissant bras droit de Sarkozy joue les chaperons pour Karim Wade (l'influent fils du Président), on comprend aisément que Ségo ne soit pas invitée à prendre l'apéro avec Wade».
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La crise expliquée par les maths...
"Cesse-t-on de consulter la météo après une tempête imprévue ? Non, bien sûr. Les tornades et tsunamis délivrent au contraire des données que les scientifiques des services de météorologie s'empressent d'analyser pour perfectionner leurs prévisions.
Ainsi en est-il de la finance. La crise donne du grain à moudre aux mathématiciens. Près de 600 d'entre eux étaient réunis les 19 et 20 mars, à Paris, à l'occasion du deuxième Forum international sur la recherche en finance, organisé par l'Institut Europlace. "La crise est un cas magnifique pour un chercheur ; un cas intéressant, comme dirait un médecin d'un malade", apprécie Pierre-Louis Lions, médaille Fields (l'équivalent du prix Nobel pour les mathématiciens de moins de 40 ans) et professeur au Collège de France.
"On a trop fait confiance à des modèles trop simples, à des agences de notation qui elles aussi s'appuyaient sur des modèles simplistes", souligne Michel Crouhy, directeur recherche et développement de Natixis. "Les banques qui ont le moins perdu sont celles qui ont utilisé les modèles les plus sophistiqués", affirme Valérie Rabault, responsable Risk Strategy pour les activités Dérivés-action de BNP Paribas.
La crise permet de mieux cerner les faiblesses des modèles mathématiques. Quatre défis attendent les chercheurs."...
Premier défi : la fiabilité des données.
Les modèles ne peuvent être fiables que s'ils utilisent des données qui le sont. Or ce n'était plus le cas dans les années qui précédèrent la crise. "En 2000, les trois quarts des prêts américains immobiliers risqués (les subprimes) étaient bien documentés. En 2006, la moitié seulement l'était. Car vérifier l'information coûte cher", explique Til Schuermann, de la Banque centrale (Federal Reserve) de New York.
Deuxième défi : gérer la pénurie.
Les modèles et les régulations conduisent un grand nombre d'acteurs à adopter le même comportement. Quand la crise a commencé, ils ont été nombreux à vouloir acheter les mêmes produits pour se couvrir, et n'en ont plus trouvé sur le marché. Ou, quand il y en avait, "ils étaient vendus à des prix exorbitants, du fait d'une volatilité (fluctuation des cours) exceptionnelle", observe Mme Rabault.
En outre, "les instruments nécessaires pour couvrir des titres dont la valeur chute de plus de 40 % en quelques jours n'existaient tout simplement pas sur les marchés cotés, parce que personne n'avait pensé que des clients en auraient un jour besoin", ajoute cette spécialiste. Cette situation de pénurie n'est pas prévue dans les modèles, qui considèrent que tout produit financier est à tout moment disponible sur le marché. "Ce risque de liquidité intéresse les chercheurs", confirme Monique Jeanblanc, professeure de mathématiques à l'université d'Evry.
Troisième défi : les interactions entre les acteurs.
Au lieu de gérer la situation d'une banque indépendamment des autres, les modèles mathématiques devront prendre en compte "le risque systémique", ajoute Christian Gouriéroux, professeur au Centre de recherche en économie et statistiques (Crest) et à l'université de Toronto. Les comportements des traders doivent être mieux étudiés. "La crise va recentrer la recherche vers la compréhension des mécanismes, les interactions entre les agents, la physique du marché", se réjouit Frédéric Abergel, professeur, titulaire de la chaire de finance quantitative à l'Ecole centrale de Paris.
Ces modèles existaient depuis le début de la décennie, mais étaient peu utilisés "parce qu'ils mettaient plus en évidence les risques, ce qui impliquait que les banques devaient faire plus de provisions, hypothèse qu'elles n'avaient guère envie d'entendre ! La crise va faire ressortir ces modèles issus de l'éconophysique, qui complètent les modèles mathématiques", ajoute M. Abergel. Pour y parvenir, il faut aussi que les modèles ne soient plus statiques, comme le sont la plupart d'entre eux, mais dynamiques, c'est-à-dire qu'ils tiennent compte de l'évolution des situations et des risques encourus. Mais peu de praticiens sont formés à l'utilisation des modèles dynamiques.
Quatrième défi : mieux considérer les risques.
Le métier de gestionnaire des risques est moins respecté que celui de commercial (trader). "Mes meilleurs étudiants ont été embauchés par les traders. Ceux chargés de mesurer les risques étaient moins bien traités, ce qui a introduit des distorsions. C'est un point clé de l'histoire", insiste Jean-Michel Lasry, conseiller scientifique de Calyon. A diplôme égal, un mathématicien travaillant à la gestion des risques, avec cinq ans d'expérience, gagne environ quatre à cinq fois moins que son collègue "quant" - analyste quantitatif, spécialiste des titres financiers sophistiqués -, qui met ses compétences aux profits des traders. CQFD.
Annie Kahn
Article paru dans l'édition du 28.03.09. "Le Monde.fr"
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Le gouvernement et les syndicats ont un intérêt commun à canaliser l'angoisse sociale. Mais le pouvoir devra concéder davantage.
un article de jean-marie Colombani du vendredi 20 mars 2009
Alors, on continue? On continue! Oui mais comment? Telle est la question que peuvent se poser les organisations syndicales au lendemain de la journée de manifestations du 19 mars, plus importantes que lors de la précédente journée six semaines plus tôt. Comment concrétiser ce succès qui les met en bonne posture de négociation, mais qui ne nuit pas non plus au gouvernement.
Succès maîtrisé donc. Comme si les syndicats avaient voulu désamorcer la critique qui s'amorçait dans l'opinion, ils ont moins mobilisé dans la fonction publique, du coté donc de ceux que protège leur statut et la garantie de leur pouvoir d'achat, et davantage dans le secteur privé, là où grandit le nombre des victimes de la crise, travailleurs précarisés ou plus durement encore précipités au chômage. Des cortèges plus imposants et mieux composés, donc, voulant donner l'image d'une solidarité entre les deux France, celle que l'on dit à l'abri (ce n'est globalement pas faux) et celle qui en prend plein la figure, Entre ce lendemain de mobilisation réussie, et le 1er mai, rendez-vous logique pour le prochain grand rassemblement, les syndicats devront imaginer une sorte de continuum de la mobilisation, dans les régions les plus touchées par les restructurations qui se profilent, afin de maintenir le gouvernement sous pression.
Ils sont déjà forts de la position qu'ils ont conquise: voilà bien longtemps que l'on n'avait vu un rapport de force aussi favorable, pour des organisations qui étaient jusque là plutôt spectatrices, et qui se sont relacées en interlocutrices obligées, et légitimées par la foule.
La situation n'est pas pour autant trop inconfortable pour le gouvernement. Car si le seul prix à payer devait être cette dialectique très contrôlée entre lui et les syndicats, scandée par des cortèges qui, à intervalle régulier, permettent d'"évacuer la pression", pour parler le langage des terrains de football, il serait à coup sûr gagnant.
Le pouvoir donne d'ailleurs l'impression, une fois n'est pas coutume, de jouer avec le temps. On en gagne en organisant un sommet social à l'Elysée, d'où sortent des annonces "sociales", dirigées vers les premières victimes de la crise (chômeurs à temps plein et à temps partiel, à qui l'on promet une meilleure indemnisation, personnes à très bas revenus, pour lesquels on annonce une prime, petites classes moyennes que l'on exonère partiellement de l'impôt sur le revenu); rien de tout cela n'est à négliger pour les intéressés; et le temps de la mise en place, précisément, permet d'occuper le terrain; et d'éviter une problématique plus globale, d'une relance "par la consommation" que les partenaires sociaux comme l'opposition voudraient voir mettre en avant. Tenir, donc, sans céder plus avant, jusqu'aux premiers bourgeons du printemps; celui que Jean-Claude Trichet entrevoit pour le printemps 2010.
Pour le moment, le pouvoir s'en tient, en outre, à un schéma politique classique: Nicolas Sarkozy est impopulaire, certes; mais il n'y a pas d'alternative encore visible à droite. Règle en vigueur aux Etats-Unis et que le président voudrait à coup sûr importer: un premier mandat étant censé préparer le second, le titulaire ne se voit opposer personne de son camp; encore faut-il que ce camp-là s'y retrouve.
Nicolas Sarkozy, qui est contraint à des mesures d'interventions publiques, voire de nationalisations partielles à travers des prises de participation de l'Etat, dont l'inspiration est plus socialiste que libérale, doit pour garder le contact avec le noyau dur de son électorat, refuser de céder à la gauche et à une partie de ses amis sur le "bouclier fiscal", mesure dont il n'a pas la paternité (il a été installé par le gouvernement Villepin) mais qui est devenue, la pression hostile aidant, un marqueur idéologique de la droite.
Pour autant, le sentiment d'injustice existe. Il faudrait que l'on soit sourd et aveugle à l'Elysée pour ne pas s'en apercevoir. D'où l'ultimatum de François Fillon au Medef, décidément grand perdant du 19 mars: si rien n'est fait pour limiter les sur-rémunérations des patrons, il y aura une loi. Rendez-vous dons le 31 mars, date d'expiration du délai de réflexion fixé par le premier ministre! Nicolas Sarkozy espère sans doute dégager au moins ce terrain d'entente avec les syndicats.
Cela suffira-t-il? Sans doute pas. La suite est entre les mains des Français eux-mêmes. Pour le moment, ils donnent tort, du moins ceux qui protestent, à ceux qui à l'extrême gauche, voudraient pouvoir jouer la politique du pire. Mais pour que le syndicats gardent la main, il faut que le pouvoir y mette du sien; plus qu'il n'en a concédé jusqu'à présent, sans doute (c'est-à-dire une enveloppe sociale bien inférieure à ce qu'il accepte de perdre en recettes au bénéfice de la restauration soit 1,5 milliard, versus 3 milliards). C'est une partie délicate pour les deux parties, comme pour nous tous.
Jean Marie Colombani
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"Comme Jacques Chirac en son temps, Nicolas Sarkozy a donc fini par céder au grand discours d’exaltation de la République et de ses valeurs. Un signe d’impuissance, comme il le reprochait alors à son prédécesseur ? A Palaiseau hier, dans l’enceinte de l’Ecole Polytechnique, le chef de l’Etat a cherché à se différencier de son aîné en soulignant qu’il «ne suffit pas de glorifier la République pour qu’elle demeure vivante». Et d’ajouter que «le plus grand danger qui menace notre modèle républicain, c’est que la République devienne une idéologie désincarnée».
Boursiers. Pour la revitaliser et lui donner un contenu concret, Nicolas Sarkozy a déballé un arsenal de mesures afin de favoriser la diversité sociale et ethnique. Il a aussi annoncé la nomination de Yazid Sabeg, un patron français d’origine berbère, comme «commissaire à la diversité et à l’égalité». A charge pour lui de mettre en œuvre le nouveau concept de «volontarisme républicain» du Président.
Dès 2009, Sarkozy souhaite que 25 % des places de chaque lycée préparant aux concours des grandes écoles soient réservées aux meilleurs élèves boursiers. Un taux qui devra atteindre 30 % dès 2010. Des «internats d’excellence» seront créés à leur intention. Les ministères sont eux aussi appelés à mettre le pied à l’étrier aux «jeunes de condition modeste» via les écoles de fonctionnaires qui leur sont attachées.
«Critère social». Pour contourner les très controversées questions des quotas et des statistiques ethniques, Nicolas Sarkozy a opté pour le «critère social». Selon lui, c’est par là «qu’il faut prendre le problème parce que les inégalités sociales englobent toutes les autres». Reprenant un thème cher à Jacques Chirac mais resté lettre morte, le président de la République a estimé qu’en «réduisant toutes les fractures sociales, on réduira du même coup toutes les fractures ethniques, religieuses et culturelles». Grâce à cette habileté, il espère s’éviter les accusations de favoriser le communautarisme tout en privant d’arguments ceux qui lui reprocheraient de pénaliser les Français «de souche», comme le dit Le Pen. En revanche, il est resté très flou sur la question des statistiques ethniques qui, selon certains, pourraient être utiles comme outil d’évaluation des discriminations à l’embauche ou dans le travail. «Si la question des statistiques pour mesurer les inégalités et les discriminations liées à l’origine est ouverte, la question d’une action publique volontariste fondée sur des critères ethniques ou religieux doit être close», a-t-il déclaré. A charge pour les scientifiques d’établir des «instruments de mesure dans le consensus pour mesurer si la politique qu’on engage produit des résultats».
Pour le reste, il a recyclé l’idée «d’expérimenter» les CV anonymes dans 100 grandes entreprises, disposition qui figure déjà dans la loi sur l’égalité des chances d’avril 2006 sans que les décrets d’application ne soient jamais publiés… Il a aussi proposé que les marchés publics d’Etat soient conditionnés à la mise en place d’actions favorables à la diversité par les entreprises. Pour elles et les administrations, un «label diversité» sera lancé début 2009. Enfin, les partis politiques, cancres de la diversité, pourraient voir leur financement «conditionné» en fonction des places éligibles accordées aux membres des minorités. Chiche ?"
Cliquez ici pour accéder au texte de « Libération.fr »(Antoine Guiral)
« Trois semaines après la mort d'un étudiant de 26 ans, poignardé dans le centre de Grenoble par un homme qui s'était échappé d'un hôpital psychiatrique où il avait été hospitalisé d'office, Nicolas Sarkozy a présenté aujourd'hui des mesures pour que "le drame ne se reproduise pas". A Antony (Hauts-de-Seine), il a tenu un discours sur la psychiatrie que certains spécialistes jugent le plus "sécuritaire" depuis des décennies.
Le président y a notamment annoncé la "réforme de l'hospitalisation d'office". Cette procédure, qui est une mesure d'ordre public, est une décision du préfet -ou du maire dans les petites villes. Elle concerne les "personnes qui nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public".
Explication de Sarko : "le drame de Grenoble ne doit pas se reproduire. Vous me direz que les hospitalisations d'office ne représentent que 13% des placements. Mais c'est celles qui exigent le plus de précautions, celles qui sont le plus difficiles".
De son passage au ministère de l'Intérieur, Sarko a conservé cette tendance à gonfler les chiffres pour frapper les consciences. Car ce chiffre de 13% d'hospitalisations d'office est tout à fait faux. Ces hospitalisés d'office, qui présentent effectivement un caractère de dangerosité (souvent vis à vis d'eux-mêmes) ne représentent en fait que 2% des placements.
Les 13% évoqués par Sarko correspondent aux "hospitalisations sans consentement". « Ces derniers intègrent effectivement les placements d'office, mais concernent surtout, et en grande majorité, les placements à la demande d'un tiers, c'est à dire les hospitalisations de personnes dont les troubles rendent impossible le consentement. Et qui n'ont rien à voir avec le profil du meurtrier de Grenoble. »
Cédric Mathiot
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Devenu depuis peu une espèce en voie de disparition, le secret des sources des journalistes sera ajouté prochainement à l'article 2 de la loi de 1881 sur la liberté de la presse.
Les juges amateurs de safaris anti-journalistes n'ont qu'à bien se tenir, le soldat Dati est envoyé en mission commandée avec un beau projet de loi, bancal comme on les aime (voir le texte sur le site de l'Assemblée). Son mépris des journalistes, Nicolas Sarkozy l'avait prouvé à de nombreuses reprises.
En Sarkozie, les crimes de lèse-majesté sont sévérement punis, que ce soit le journaliste Airy Routier, poursuivi en justice pour avoir dévoilé l'existence du SMS envoyé à Cécilia, ou le patron de Paris Match Alain Genestar, licencié pour avoir publié des photos de Cécilia (encore elle) en compagnie de son nouveau compagnon Richard Attias.
On peut donc s'étonner de cette soudaine passion du Président de la République pour le secret des sources des journalistes. Mais en observant de près le projet de loi concocté on remarque que ce texte porte en réalité un certain nombre d'atteintes au secret des sources voire à l'intégrité de la profession de journaliste.
Tout d'abord, les juges pourront contourner le secret des sources en cas de "crime ou délit grave". Non seulement on apprend au passage que dans l'esprit de Madame Dati il peut exister des crimes qui ne sont pas graves, mais on sait désormais que les juges peuvent, sous couvert de "sureté nationale", se permettre d'attenter aux libertés fondamentales que sont le respect du domicile et du respect des biens.
Mais qu'on se rassure, soldat Dati veille au grain: les perquisitions des magistrats dans les organes de presse mais aussi au domicile des journalistes sont autorisées, à condition que cela n'empêche pas la parution d'un journal ou interrompe un programme télé. Bien maigre consolation, car si les reporters ont le droit de se taire, les juges obtiennent le droit de "faire parler" leurs ordinateurs. Et Dati s'empresse d'ajouter: les documents saisis sont toutefois soumis à l'arbitrage du juge des libertés car en cas de contestation, le document incriminé est placé sous scellé, et ne peut être restitué au journalistes que si le juge des libertés donne raison à ce dernier.
Là encore, nouvelle entourloupe: un juge du siège a t-il l'habitude de contredire un autre juge du siège.
Ignorance crasse ou cynisme d'état, cette loi annonce un nouvel épisode de la démocratie en Sarkozie: là où une inscription du pluralisme de la presse dans la Constitution est exigée par les Socialistes, Sarkozy répond par un texte issu directement de ses mésaventures personnelles avec les derniers survivants du journalisme d'investigation français.
Nicolas Brien
Depuis de nombreux mois, tous les instituts de conjoncture indiquent que la croissance française sera de 1,5% en 2008, et non 2,25% comme prévus dans le budget 2008.
Acculé, le gouvernement vient de prendre partiellement acte de ses erreurs en indiquant que le déficit public a dérapé en 2007 et que la croissance serait « de 1,7% » en 2008. Mais, il ne tire aucune conclusion de cet aveu tardif, puisque le Premier ministre indique que « cette révision n’aura aucun effet sur le budget 2008 ».
Le Parti socialiste condamne l’aveuglement du gouvernement qui ne tire aucune conclusion de ses propres dénégations. Une telle erreur de prévision aura bel et bien des répercussions, puisqu’elle privera l’État 10 milliards d’euros de recettes fiscales. De plus, le gouvernement devra parallèlement mettre en œuvre un plan de rigueur d’une ampleur analogue s’il souhaite respecter son engagement de ramener le déficit public à 2,3% du PIB fin 2008. Or, il ne dispose d’aucune marge de manœuvre, puisque l’intégralité des crédits budgétaires qu’il a gelé (7 milliards d’euros) suffit à peine à couvrir le montant de ses promesses électorales hâtives et non financées (6,8 milliards d’euros).
Le choix du gouvernement de maintenir le paquet fiscal va donc le pousser inéluctablement à mettre en place un plan de rigueur de 20 milliards d’euros en deux temps : un « tour de vis budgétaire » suivi d’une hausse des prélèvements pesant sur les ménages. Pour le Parti socialiste, la rigueur n’est pas une fatalité mais un choix.
Le Parti socialiste demande donc une nouvelle fois l’annulation du paquet fiscal, préalable incontournable pour dégager les marges de manœuvres nécessaires au financement :
• de mesures en faveur du pouvoir d’achat : baisse de la TVA sur les produits de première nécessité, réduction des taxes pesant sur les carburants, hausse de 50% de la Prime pour l’Emploi, adoption d’un plan de rattrapage des traitements dans la fonction publique, revalorisation immédiate de 5% pour toutes les petites retraites, généralisation du chèque transport ;
• de la restauration de la compétitivité en profondeur de nos entreprises : refonte des aides aux entreprises pour mettre en place une fiscalité sur mesure en direction des PME exportatrices ou innovantes, modulation de l’impôt sur les sociétés en fonction de l’investissement des entreprises, hausse de l’effort budgétaire en direction de la recherche, de l’innovation et de l’enseignement supérieur.
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Communiqué de Michel Sapin, ancien ministre, secrétaire national à l’économie et à la fiscalité du parti socialiste
L'Assemblée nationale examine ce mardi un projet de loi ratifiant l'ordonnance du 12 mars 2007 relative au Code du travail, qui réécrit de fond en comble ce texte régissant la vie professionnelle de 17 à 18 millions de salariés. Le texte a déjà été adopté par les sénateurs le 26 septembre.
Les députés PS, PCF et Verts, la CGT, le Syndicat de la magistrature et le syndicat des inspecteurs du travail Snutef (FSU) ont vivement protesté lundi, lors d'une conférence de presse commune, contre la recodification du Code du travail qui "remet en cause des droits des salariés".
"C'est scandaleux. Cela devait être une recodification à droit constant, une procédure normale pour rendre un texte lisible et accessible" or, on a "un texte qui va modifier le fond du droit" aux dépens des salariés, s'est indigné le député PS Alain Vidalies.
L'opposition défendra trois motions de procédure et environ 150 amendements pour tenter de modifier le texte. Elus de gauche et syndicats ont critiqué la "déclassification" de 500 articles, qui passent de la partie législative du Code à sa partie réglementaire, c'est-à-dire qu'ils relèveront de décrets et seront donc plus facilement modifiables.
Ils dénoncent également "l'éclatement du Code du travail" par le transfert de dispositions vers des codes parallèles comme le Code rural, le Code maritime ou le Code des transports, ainsi que l'adjonction "de 1.761 articles supplémentaires".
"L'atomisation du Code du travail, c'est le pire des dangers qui guettent les millions de salariés", a jugé Roland Muzeau (PCF). Selon l'inspecteur du travail Richard Abouzit, les salariés agricoles "perdront le 1er mai comme jour férié et l'affichage du nombre d'heures travaillées ne sera plus obligatoire".
Martine Billard (Verts) s'est élevée contre "le silence total" dans lequel s'est faite cette recodification, à laquelle l'Assemblée a prévu de consacrer "moins d'heures de débat que pour le texte sur les chiens dangereux". Elle s'est inquiétée "d'ajouts ou de suppressions significatifs" comme le fait que "le travail dominical sera désormais subordonné aux besoins du public".
L'inspecteur du travail Gérard Filoche, membre du conseil national du PS, s'est élevé contre "la suppression du doublement des indemnités de licenciement accordé en 2002" et "le partage des obligations en matière d'hygiène et de sécurité entre l'employeur et le salarié".
Hélène Franco (syndicat de la magistrature, gauche) a dénoncé un "droit notablement complexifié" et "une protection moins forte pour les salariés".
Dans un communiqué, le rapporteur UMP du projet, Jacqueline Irlès, a défendu le texte qui "permet de rendre plus accessible le Code du travail, sans modifier le contenu".
Selon elle, il va "également permettre d'insérer des dispositions votées récemment", comme "la formation des femmes reprenant une activité" ou "combler des oublis en matière de congé maternité".
Communiqué AFP