Tout ça pour ça, serait-on tenté d'écrire. Nicolas Sarkozy assistera à la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques de Pékin, vendredi 8 août, et il ne rencontrera pas le dalaï-lama, qui commence le 11 août une visite en France. Le président de la République, et du Conseil européen jusqu'à la fin 2008, est ainsi très loin des positions qu'il a affichées depuis plusieurs mois. N'était-ce donc que fanfaronnades ?
C'est pourtant Nicolas Sarkozy qui, le 10 juillet, indiquait sèchement à Strasbourg, devant le Parlement européen : "Ce n'est pas à la Chine de fixer mon agenda et mes rendez-vous." Certes, son épouse, Carla Bruni, rencontrera, elle, le chef spirituel des Tibétains. Mais ce compromis ne peut pas masquer le retournement français. Après la répression des émeutes antichinoises au Tibet en mars, M. Sarkozy avait prévenu qu'il n'assisterait à la cérémonie d'ouverture que si la Chine renouait le dialogue avec les représentants du dirigeant en exil. Pendant des semaines, son entourage avait indiqué que sa présence serait équilibrée par une rencontre avec le dalaï-lama.
Certes, Berlin est dans une situation plus confortable que Paris vis-à-vis de Pékin : la Chine a besoin des machines-outils que lui vend l'Allemagne, ce qui oblige les dirigeants chinois à accepter les critiques sur les droits de l'homme d'Angela Merkel. C'est dans ce contexte que M. Sarkozy s'est senti obligé de se rendre à la cérémonie d'ouverture des JO, sans condition, pour tenter de restaurer les relations de Paris avec Pékin. Après les dégâts causés par le passage chaotique de la flamme olympique dans la capitale française, la crise bilatérale a été aggravée par ce que les Chinois ont considéré comme un chantage et une ingérence dans leurs affaires intérieures.
M. Sarkozy perd aujourd'hui sur tous les tableaux : qu'il s'agisse des droits de l'homme et de l'image internationale de la France ou de ses relations avec les autorités chinoises, qui savent désormais quel poids il faut accorder aux exigences françaises. Sans doute, avec ce revirement, M. Sarkozy prend-il en compte le poids international, non seulement économique, mais aussi politique, de Pékin, par exemple sur la question du nucléaire iranien. Mais mieux valait alors s'abstenir de bomber le torse quelques semaines avant d'aller à Canossa.
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Article paru dans l'édition du journal « Le Monde » du 08.08.08. Cliquez pour le lire dans son contexte !
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