La crédibilité et la sécurité des projets d'enfouissement et de réduction des déchets nucléaires risquent d'être remises en cause par les industriels du secteur "au nom de la rentabilité à court terme", s'alarme l'office parlementaire Opecst dans un rapport publié mercredi.
Ce rapport d'évaluation du Plan national de gestion des matières et déchets nucléaires pour 2010-2012 s'inquiète plus globalement des "inconvénients d'une privatisation croissante" de la filière.
Une tendance qui amène progressivement les industriels à céder à "des préoccupations financières de courte vue" qui peuvent aller à l'encontre des intérêts de la filière dans son ensemble, jugent Claude Birraux, député UMP et président de l'Opecst (Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques), et le député socialiste Christian Bataille.
Le rapport, présenté mercredi à la presse, déplore notamment que les "grands producteurs de déchets, EDF en tête, suivie d'Areva et du CEA", cherchent à remettre en cause la compétence de l'Andra (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs) dans le projet d'enfouissement profond des déchets les plus dangereux.
Selon les parlementaires, cette démarche est motivée par l'annonce de l'Andra d'une réévaluation du coût du projet de stockage géologique profond. Jusqu'à présent estimé à 15 milliards d'euros, ce coût pourrait être porté à 35 milliards pour tenir compte de nouvelles normes de sûreté.
En vertu du principe "pollueur payeur", la loi impose à EDF de financer 80% du centre de stockage, contre 15% pour le Commissariat à l'Energie Atomique (CEA), le reste se répartissant entre les autres producteurs de déchets (Areva, etc.).
"Les industriels proposent des solutions techniques alternatives dont l'impact sur la sécurité reste totalement à évaluer", a souligné M. Birraux, insistant "sur la nécessité d'écarter tout compromis sur la sûreté du stockage", imposée par la loi en 2006.
Non seulement la loi interdit aux trois grands producteurs de déchets nucléaires de se substituer à l'Andra mais il s'agit d'une mission de service public qui "ne saurait, en aucun cas, même partiellement, être confiée à des sociétés, avant tout intéressées à maximiser leurs profits, et susceptibles de passer, à terme, sous contrôle privé", insiste le rapport.
Et l'Opecst d'adresser "un rappel à la loi" aux producteurs de déchets.
"Les acteurs de l'industrie nucléaire doivent se reprendre (...) Il conviendrait qu'ils se réapproprient l'idée que l'avenir de la filière dépend crucialement de sa capacité à démontrer qu'elle sait gérer les déchets radioactifs dans les meilleures conditions de sûreté", conclut l'Opecst.
Les députés critiquent par ailleurs "le retard pris par le gouvernement dans l'installation de la Commission nationale d'évaluation des financements (CNEF)" compétente pour le démantèlement des installations nucléaires, la gestion des combustibles usés et les déchets radioactifs.
Source : afp
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Communiqué
Samedi 22 Janvier
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Le nucléaire hexagonal :
une pétaudière révélée par deux députés, une filière au bord de l’occlusion par ses déchets
Les deux députés Birraux et Bataille viennent de rendre public (19 janvier) un rapport pour l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst). Une analyse de plus sur la gestion des déchets nucléaires et qui aurait dû passer inaperçue si les auteurs, pro-nucléaires notoires, ne dressaient un réquisitoire implacable contre l’industrie nucléaire française et sa courroie de transmission, les pouvoirs publics.
Les mythes ont la vie dure, on veut tellement y croire. Arrive pourtant un jour où il faut se rendre à l’évidence, tout n’était que façade. L’équipe de France nucléaire, longtemps présentée comme ‘champion mondial’, en est un exemple emblématique. Il a fallu qu’un juteux contrat lui passe sous le nez aux Emirats pour que les langues se délient. Les yeux s’étant ouverts, le rapport de l’Opecst dresse un sombre tableau, fait de « tensions (…) incohérences (…) manœuvres (…) ». Les inquiétudes des auteurs de l’étude se font encore plus vives quand ils évoquent les déchets du nucléaire. Alors que jusqu’il y a quelques mois leur gestion semblait bien encadrée, laissant croire que ce problème essentiel de l’énergie nucléaire avait trouvé solution, force est de reconnaître au tandem Birraux-Bataille que le consensus au sein du lobby se lézarde et les dérives se multiplient, tandis que manifestement les populations ne se laissent plus manipuler comme auparavant.
L’aveu
Premier point sur lequel s’appesantit le rapport : la séparation-transmutation des déchets, techniques ayant pour objectifs d’en diminuer le volume et la toxicité. Première surprise, les auteurs sortent de leur autocensure habituelle en confirmant ce que dénoncent les associations opposées à l’enfouissement. Oui, les industriels font peu d’efforts envers la transmutation, ils la freinent même, et c’est pire encore pour l’administration. Industriels et pouvoirs publics délaisseraient-ils la voie de la transmutation tout simplement parce que celle de l’enfouissement leur semblait -enfin- sur de bons rails ? Ce qui voudrait dire que les lois de 1991 et de 2006, qui mettaient la transmutation parmi les solutions à étudier, auraient été bafouées. Ce qui voudrait dire que, dans ces lois, la transmutation n’a été glissée que pour faire accepter la pilule, laissant croire à un panel de solutions possibles (tout comme la loi de 1991 promettait un choix ultérieur entre « des » laboratoires alors qu’un seul ne fut effectif, la loi étant là aussi bafouée).
Une facture délirante
Le feu a été mis aux poudres fin septembre. Chacun sait que le trou de Bure, pudiquement dénommé « laboratoire », est un gouffre financier. Les études menées jusqu’à ce jour, et rien qu’elles, se montent déjà à la bagatelle de un milliard d’euros. Quant au coût d’un dépotoir souterrain, les volumes de déchets sont tels qu’il faudrait creuser des centaines de kilomètres de tunnels, galeries et autres alvéoles, pour une facture exorbitante de 15 milliards d’euros. Facture largement réévaluée puisque l’on parle à présent de 35 milliards, voire de 50 milliards d’euro. Il est vrai, d’une part que nul ne sait vraiment ce qu’il y aurait à enfouir (ce qui joue fatalement sur le coût) et d’autre part la commission ad hoc prévue par la loi de 2006 n’a jamais rendu le rapport programmé pour… 2008.
L’enfouissement, la « solution de référence » vole en éclats
L’agence des déchets nucléaires (Andra) assène à qui veut l’entendre que l’enfouissement des déchets nucléaires HMA-VL (les pires en terme de toxicité et de longévité) est internationalement LA solution de référence retenue. Faute de grives on mange des merles, mais quand le prix du merle explose on le délaisse. Exactement ce que laissent entendre les producteurs de déchets nucléaires (Edf, Areva, Cea), financeurs du cimetière souterrain (pollueurs-payeurs). Ils le laissent entendre si fort que le député Bataille s’émeut des solutions alternatives qui émergent ici et là. Comme par exemple utiliser des anciennes mines (déjà creusées, donc pour une facture bien moindre). Et si le député-fossoyeur Bataille met en garde contre les risques en citant le cas de la mine Asse en Allemagne (où de l’eau inattendue s’infiltre jusqu’aux fûts de déchets radioactifs), il omet de préciser que si le stockage se faisait à Bure, à 500 mètres de profondeur, il se situerait sous un aquifère majeur. Que se passerait-il si une seule malheureuse petite faille venait à fendiller le plafond d’un site qui est prévu pour s’étendre sur 15 km², au bas mot (4 km x 4 km) ?
FAVL : le déchet nucléaire qui a fait déborder la poubelle, et l’exaspération
C’est verts de rage que Birraux-Bataille expliquent comment le projet de nouvelle poubelle nucléaire, pour les déchets nucléaires dits FAVL, a capoté, à cause « (d’)extrémistes anti-nucléaires (qui ont) exercé des menaces sur les élus locaux volontaires ». Si les deux chantres de l’Opecst étaient plus honnêtes, ou s’ils sortaient plus souvent de leur tour d’ivoire, ils auraient remarqué : que les élus ne se laissent pas si facilement corrompre (par des promesses d’argent et d’emplois) car seuls 1,5 % des municipalités appâtées ont candidaté, que le dossier de l’Andra était pipé (« opportunités » d’un côté, « erreurs » techniques de l’autre), que les municipalités ont retiré leur candidature suite à des réunions d’information organisées par leurs administrés (qui se sont informés, formés, réunis en association), que l’Andra a fuit tous les débats contradictoires (même ceux organisés par des municipalités), que le maire d’Auxon (abondamment pris en exemple pour leur thèse par Birraux-Bataille) fut une telle victime «(d’) extrémistes anti-nucléaires » que lorsqu’il s’est re-présenté aux élections municipales il obtint si peu de voix qu’il ne fut pas même élu conseiller municipal ! Le dossier noir des FAVL, édifiant, mériterait assurément d’être écrit.
Les deux compères Birraux-Bataille ont une telle crainte de la démocratie qu’ils préconisent de rechercher un nouveau site pour les FAVL... mais cette fois-ci en passant par les départements ou les régions, et non plus par les municipalités. « C'est donc pour éviter les débats que Birraux-Bataille veulent délocaliser les décisions, loin des communes et de leurs habitants. On délocalise les décideurs pour les soustraire à la vindicte du peuple souverain ! », suivant l’analyse pertinente d’un connaisseur, M.Simon, d’une association créée contre les FAVL dans le sud Marne (1).
Si « l'avenir de la filière dépend crucialement de sa capacité à démontrer qu'elle sait gérer les déchets radioactifs », dixit Birraux-Bataille, il va falloir qu’ils regardent la réalité en face. Et se poser encore plus de questions que dans leur rapport, car si l’Andra est toujours à Bure c’est uniquement parce que le dossier est basé sur trois piliers, d’argile : mensonge (laboratoire et pas enfouissement, géologie idéale), corruption (débauche d’argent sur la région), despotisme (non démocratie). Au point que pour implanter ce projet les pouvoirs publics ont transformé le Pays de Bure en un véritable BURISTAN, suivant l’étude magistrale du CEDRA
Déchets nucléaires ingérables : arrêter d’en produire. Nucléaire : en sortir, au plus vite > c’est ici et là
Rapport de l’OPECST : http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/rap-off/i3108.pdf
(1) Auteur de la brochure « Marcel résiste… mais pas seul »
Rédigé par : FéDé STOP déchets nucléaires | 23 janvier 2011 à 10:13