En quelques semaines, plus de 2.000 fantassins ont reçu leur nouvelle tenue Félin. La concrétisation d'un programme de 1 milliard d'euros confié à Sagem en 2004. Le premier du genre en Europe.
Viseur de tir dans les coins, jumelle de vision nocturne, protection nucléaire, bactériologique et chimique, sans oublier l'ostéophone, qui permet de communiquer par les os du crâne : le fantassin français a entamé une mue technologique sans précédent.
Non pas que les descendants des pioupious de 1914 soient sous-équipés. Mais avec le déploiement du programme Félin, un acronyme pour Fantassin à équipements et liaisons intégrés, c'est d'un système de combat et de protection ultramoderne dont ils vont disposer.
« On ne peut plus parler de tenue du soldat du futur », estime Laurent Barraco, directeur du programme à la DGA, puisque plus de 2.000 fantassins ont déjà été équipés et que leur nombre ne cesse de croître.
La genèse du programme remonte à la fin des années 1990. Faute d'avoir pu trouver un partenaire étranger, la France se lance seule dans l'aventure.
Après une première démonstration, un contrat est confié en 2004 à Sagem (groupe Safran aujourd'hui), qui coiffe 25 sous-traitants.
Les années 2007 à 2009 servent aux tests, dans des environnements variés et extrêmes : centre de combat urbain de Sissonne, dans le nord de la France, montagnes des Alpes, désert de Djibouti ou encore forêt équatoriale de Guyane.
En 2008, un événement important : la loi de programmation militaire réduit substantiellement l'ampleur du projet. L'armée ne touchera finalement que 22.588 systèmes, au lieu des 31.455 prévus initialement, pour une facture estimée à environ 1 milliard d'euros, développement inclus.
« Contrairement à d'autres pays, comme les Etats-Unis, la France a choisi une approche système », poursuit Laurent Barraco.
En clair, tous les équipements électroniques qui composent Félin sont reliés entre eux via un calculateur unique, le tout alimenté par deux batteries principales (plus deux de secours) offrant une autonomie de vingt-quatre heures.
Surtout, chaque équipement a été développé en parallèle pour garantir la cohérence d'ensemble. A titre d'exemple, les poches des gilets ont été conçues en fonction des équipements qu'elles abritent. « La charge est mieux répartie ainsi », assure le colonel Bernard Rey, officier de programme à la section technique de l'armée de terre. Au final, un peu moins de 30 kilogrammes en posture de combat, pour une tenue qui rappelle celle de RoboCop.
Le premier régiment d'infanterie de Sarrebourg, qui a fait une présentation publique le lundi 7 février, est équipé depuis octobre. Le 13e bataillon de chasseurs alpins de Chambéry reçoit ses tenues en ce moment, en attendant les 16e bataillon de chasseurs de Bitche, 92e RI de Clermont-Ferrand et 35e RI de Belfort cette année.
L'état-major table sur quatre régiments équipés par an jusqu'en 2015, alors que les programmes équivalents en Europe n'en sont, au mieux, qu'à des déploiements partiels. Pour un résultat qui semble satisfaire tout le monde. Les militaires d'abord, puisque, selon le colonel Bernard Rey, Félin accroît de 70 % les performances de vision de jour et de 160 % la nuit.
« Les phases critiques, la sortie de blindés par exemple, se font plus vite. »
L'industriel, Sagem, ne s'en est pas trop mal sorti non plus. S'il vend finalement 9.000 tenues en moins, le prix unitaire n'a pas trop bougé et les cadences de production ont été maintenues, assure-t-on à la DGA.
A lire dans son contexte et son intégrité (lesechoc.fr/alain ruello)
photos sagem
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