Au diable les rites de la République ! Fini le micro que l'on installe en fin d'après-midi sur le perron de l'Elysée. Fini le secrétaire général de la présidence de la République qui s'avance face aux caméras, déplie une feuille de papier et égrène la liste des nouveaux ministres. Hier soir, c'est Nicolas Sarkozy qui s'est lui-même chargé de cette mission.
Sur fond de bibliothèque et de drapeau tricolore, un plan fixe, cadrage serré ; une longue séquence de près de 7 minutes qui donnait un aspect pour le moins figé à cette intervention présidentielle. Lisant le texte de son allocution sur un prompteur, le chef de l'Etat ne s'est autorisé aucune improvisation. Quelques jours après sa prestation sur TF1 en compagnie de Jean-Pierre Pernaut, le contraste était saisissant.
"C'est mon devoir, a dit le chef de l'Etat, de prendre les décisions qui s'imposent quand les circonstances l'exigent." Les circonstances ? "Un immense bouleversement de l'autre côté de la Méditerranée."
Pas la moindre allusion aux vacances tunisiennes de Michèle Alliot-Marie ; pas davantage à la double
condamnation de Brice Hortefeux. Les noms de ces deux ministres déchus n'ont pas été prononcés. Aucune explication si ce n'est cette phrase sibylline : "Mon devoir de président de la République est d'expliquer les enjeux de l'avenir mais tout autant de protéger le présent des Français. C'est pourquoi, avec le premier ministre François Fillon, nous avons décidé de réorganiser les ministères qui concernent notre diplomatie et notre sécurité." Comprenait qui pouvait...
Autant le dire tout net : dans cet exercice, la technique de communication de Nicolas Sarkozy est un peu rudimentaire. Quitte à vouloir abandonner le bon vieux système de l'annonce des nouvelles équipes ministérielles par le secrétaire général, autant inventer quelque chose de radicalement nouveau. Une suggestion : pourquoi ne pas s'inspirer du modèle des Césars ? Imaginez la scène. Dans la salle des fêtes de l'Elysée, sont rassemblés les différents nominés. Debout sur une scène, le président de la République ouvre une première enveloppe : "Pour le ministère de l'intérieur, sont nominés : Brice Hortefeux, Jean-Pierre Raffarin, Claude Guéant, Christian Estrosi, Frédéric Lefebvre." Quelques secondes de suspense, et il ouvre une seconde enveloppe : "Le vainqueur est... Claude Guéant !" Quelques plans de coupe, les larmes de Brice Hortefeux, des applaudissements, Claude Guéant se dirige vers le chef de l'Etat qui lui remet sa lettre de mission. Remerciements. Nouveaux applaudissements. A peine quelques secondes, juste le temps de passer au ministre suivant. "Pour le secrétariat aux anciens combattants, sont nominés..." On appellerait ça "La cérémonie des ministres". Tabac garanti à l'Audimat !
Source : Le Monde
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