Des milliers de touristes, chinois et étrangers, se pressaient sur la place Tiananmen à Pékin samedi 4 juin, jour anniversaire de l'écrasement du mouvement pro démocratique en 1989, au milieu d'un important déploiement policier.
Le 22e anniversaire intervient au début d'un long weekend férié, alors même que le régime est engagé dans une campagne de répression de toute opposition.
Depuis la mi-février, quand une partie du monde arabe s'est embrasée, des dizaines de dissidents, avocats ou militants des droits de l'Homme chinois ont ainsi été arrêtés ou assignés à résidence.
Samedi, nombre de visiteurs s'engageaient sur l'immense place devant la Cité interdite, haut lieu du tourisme en Chine, passant entre les postes de sécurité, mais la plupart refusaient de répondre aux questions, ou assuraient ne rien savoir des événements de 1989.
"J'en ai entendu parler. C'était un mouvement de protestation d'étudiants", a simplement dit un jeune homme se présentant uniquement sous le nom de Li, étudiant originaire de Mongolie intérieure, région où des manifestations ont eu lieu en mai.
"Je ne sais rien" a déclaré de son côté un homme se présentant comme un retraité originaire de Changchun (nord).
Un journaliste de l'AFP a pu observer nombre de policiers en civil, munis d'oreillettes et de talkie-walkie déambulant sur la place au milieu des nombreux touristes qui se prennent en photo devant le portrait géant de Mao qui orne l'entrée de la Cité interdite.
Sue Lorenz, une touriste américaine de 61 ans, était consciente qu'il s'agissait de l'anniversaire des événements "entre les étudiants et l'armée". Mais à peine avait elle commencé à parler avec l'AFP que plusieurs policiers sont intervenus pour mettre fin à l'interview.
Des associations de défense des droits de l'Homme ont tout récemment estimé que l'actuel tour de vis contre la dissidence en Chine rappelait précisément celui qui avait suivi l'écrasement du "printemps de Pékin".
Mais Pékin a rétorqué jeudi en assurant que les droits de l'Homme n'avaient jamais été aussi respectés en Chine qu'aujourd'hui. "En même temps, les citoyens chinois doivent respecter les lois et ne sont pas au-dessus des lois", avait ajouté Hong Lei un porte-parole du ministère des Affaires étrangères.
Quant au 4 juin, le porte-parole avait souligné que Pékin n'allait pas réexaminer l'Histoire et s'en tenait à "ses conclusions" sur ces "troubles politiques (...) du siècle dernier".
Le seul endroit en Chine où Tiananmen est commémoré est à Hong Kong et des dizaines de milliers de personnes étaient attendues samedi soir dans l'ancienne colonie britannique, rétrocédée à la Chine en 1997, pour un rassemblement à la lumière de bougies.
"Nous espérons le même nombre de participants que l'an dernier, sinon plus," a déclaré l'un des organisateurs, Lee Cheuk-yan. "Avec l'actuelle répression en Chine, nous nous attendons à ce que plus de continentaux, qui étudient ou travaillent ici, nous rejoignent", a-t-il dit à l'AFP.
Wang Dan, une des meneurs du mouvement de 1989 pour des réformes démocratiques, et Ding Zilin, porte-parole de l'association Les mères de Tiananmen, rassemblant des familles de victimes, devaient s'adresser aux participants par liaison vidéo depuis Taïwan et la Chine respectivement.
Des centaines, voire des milliers de personnes ont trouvé la mort dans la nuit du 3 au 4 juin 1989, lorsque le Parti communiste a envoyé les chars de l'armée mettre fin à sept semaines de manifestations au coeur de Pékin qualifiées par le régime de "révolte contre-révolutionnaire".
De son côté, le président taïwanais Ma Ying-jeou a appelé à l'occasion de l'anniversaire les autorités de Pékin à libérer des dissidents, notamment le prix Nobel de la paix Liu Xiaobo et l'artiste Ai Weiwei.
"Le premier pas vers la réforme politique est de tolérer les dissidents (...). Nous espérons que les autorités du continent débuteront en relâchant des gens tels que Liu Xiaobo et Ai Weiwei," a-t-il dit dans un communiqué.
Source : Le Nouvel Observateur - AFP
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