Le Parlement a adopté définitivement mardi, par un vote de l'Assemblée, une loi visant à lutter contre les usurpations d'identité en instaurant un mégafichier des données biométriques de tous les Français.
Le texte a été adopté par 285 voix pour, celles de l'UMP et du Nouveau centre, qui défendent un mécanisme "efficace et pragmatique", et 173 voix contre, celles de la gauche, qui dénonce une atteinte aux libertés.
La nouvelle loi, contre laquelle les socialistes saisiront le Conseil constitutionnel, met en place une carte d'identité biométrique adossée à un fichier centralisé, afin de lutter contre le phénomène d'usurpations d'identité qui touchent plusieurs milliers de personnes par an: 15.000 en 2009, a indiqué le député UMP Eric Ciotti.
La nouvelle carte d'identité sera munie de deux puces électroniques: la première contiendra toutes les données biométriques d'un individu (état civil, adresse, taille, couleur des yeux, empreintes digitales etc.), la seconde, facultative, servira de signature électronique sur internet pour des échanges commerciaux et administratifs.
La proposition, présentée à l'origine en juillet 2010 par les sénateurs UMP, Jean-René Lecerf et Michel Houel, a fait l'objet d'un bras de fer entre le Sénat, toutes tendances confondues, et la majorité de droite de l'Assemblée nationale et donné lieu à de nombreuses navettes.
Le litige entre le Sénat et la majorité à l'Assemblée résidait sur la nature du lien à apporter entre les données biométriques inscrites sur la nouvelle carte d'identité d'un individu et celles centralisées dans le fichier général de tous les Français.
L'Assemblée nationale, soutenue par le gouvernement, n'a cessé de défendre un "lien fort", qu'elle a finalement adopté : les données recueillies sur le terrain peuvent être mises en correspondance avec celles d'un seul individu du fichier.
Le Sénat, brandissant les risques que ferait courir un fichier généralisé aux libertés, défendait un "lien faible": à une empreinte d'un individu aurait correspondu non une seule identité mais un ensemble d'identités d'un sous-groupe d'individus du fichier. Il aurait été ainsi possible de mettre à jour l'usurpation d'identité, sans toutefois connaître l'auteur de l'infraction.
Les députés socialistes et du Front de gauche se sont élevés contre "les atteintes majeures aux libertés publiques" entraînées par ce fichier, en insistant sur les réserves exprimées par la Cnil (Commission nationale de l'informatique et des libertés.
Cette loi, selon Marc Dolez (FG) "va exposer notre pays à des recours en justice contre la Commission européenne des droits de l'homme et le risque est grand que la France soit condamnée".
"Aucune démocratie n'a osé franchir ce pas", a renchéri Jean-Jacques Urvoas (PS). En outre, a-t-il souligné, "aucun système informatique n'est impénétrable, toute base de données peut être piratée".
M. Dolez s'est élevé par ailleurs contre la possibilité d'avoir une puce pour les achats sur internet sur la carte d'identité, car celle-ci "ne doit pas être mise au service du commerce en ligne".
A l'inverse, Eric Ciotti a défendu "un texte, concret, pragmatique et protecteur de nos libertés publiques", permettant de lutter "contre un fléau qui bouleverse la vie des victimes".
Une argumentation défendue aussi par Pascal Brindeau (NC) qui a opposé "une majorité tentant d'apporter des solutions concrètes et l'opposition se complaisant dans des postures politiciennes".
Source : Afp
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