Le calendrier annoncé sera tenu : le 6 mars 2012 - dernier jour de la session parlementaire avant l'interruption pour cause d'élections présidentielle et législatives -, l'Assemblée nationale a définitivement adopté le projet de loi relatif à la majoration des droits à construire. Un parcours express pour ce texte présenté en Conseil des ministres il y a moins d'un mois, le 8 février 2012 (voir nos articles ci-contre). Après la déconstruction du projet de loi par le Sénat - qui a substitué au texte initial une disposition prévoyant que l'Etat cède gracieusement aux collectivités son patrimoine foncier disponible pour y faire construire des logements - la commission mixte paritaire a débouché sur un constat d'échec et l'Assemblée a donc eu le dernier mot en rétablissant la rédaction du gouvernement.
Le débat à l'Assemblée a été sans surprise. Les trois amendements déposés par l'opposition, qui visaient à revenir au texte du Sénat supprimé par la commission des affaires économiques, ont été rejetés. Un seul amendement - mineur - de la majorité a été déposé et voté, avec l'avis favorable du gouvernement. Il prévoit que la synthèse des observations du public lors de la consultation obligatoire si la collectivité ne souhaite pas mettre en œuvre la mesure est mise à la disposition de la population par des moyens adéquats dans les communes et les EPCI de moins de 3.500 habitants. En effet, ces petites collectivités ne disposent pas du recueil des actes administratifs visé par le projet de loi.
Au final, la loi majorera bien de 30%, pour une durée de trois ans, les droits à construire - et notamment le COS (coefficient d'occupation des sols) - dans les communes dotées d'un plan local d'urbanisme (PLU), d'un plan d'occupation des sols (POS) ou d'un plan d'aménagement de zone en vigueur à la date de publication de la loi. Sont cependant exclues les zones A, B et C des plans d'exposition au bruit, les secteurs sauvegardés et les règles spécifiques posées par les lois sur le littoral et la montagne. De même, la mise en œuvre des dispositions de la loi ne peut avoir pour effet de modifier une règle édictée par une servitude d'utilité publique. Applicable aux demandes de permis et aux déclarations déposées avant le 1er janvier 2016, la majoration des droits à construire est d'ordre public. Toutefois - autonomie des collectivités territoriales oblige - les communes ou les EPCI qui ne souhaitent pas appliquer cette disposition pourront s'y opposer, mais au prix d'une procédure assez lourde puisqu'il faudra à la fois une consultation de la population et une délibération de l'assemblée compétente. Toujours pour la même raison, une commune pourra adopter une position différente de celle de son EPCI (ne pas appliquer si l'EPCI a choisi d'appliquer et vice-versa).
Au cours de l'ultime débat à l'Assemblée, les différents groupes sont restés sur leurs positions, désormais bien établies. Pour la majorité, ce texte va libérer du foncier et permettre ainsi la construction de 30 à 40.000 logements supplémentaires. Si le relèvement des droits à construire sur un terrain donné va bien aboutir à une hausse du coût du foncier, son effet sera neutre - voir même légèrement positif - sur le coût des logements construits, puisqu'un plus grand nombre de logements pourra être construit sur le même terrain. Pour l'opposition au contraire, la réforme va surtout profiter aux promoteurs et aux propriétaires individuels aisés, qui vont ainsi pouvoir procéder à des agrandissements, et la mesure se traduira inévitablement à terme par une hausse du coût du foncier qui pèsera sur le coût final du logement.
Une saisine du Conseil constitutionnel par l'opposition n'est pas à exclure, ce qui décalera d'autant la promulgation de la loi. Mais, si le Conseil valide le texte, son application devrait être immédiate, puisque la loi ne fait aucun renvoi à un texte réglementaire.
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