Depuis le 1er décembre 2014, les dispositions de la loi pour l'égalité réelle entre femmes et hommes relatives à la commande publique sont applicables.
Publiée le 4 août dernier, cette loi a une incidence non négligeable dans la procédure de passation des marchés publics, précisément au stade de l'analyse des candidatures, puisqu'elle prévoit trois cas d'interdiction de soumissionner.
Les deux premières hypothèses concernent les candidats qui, depuis moins de cinq ans, auraient fait l'objet d'une condamnation pour discrimination en raison du sexe (art. 225-1 du Code pénal) ou pour méconnaissance des dispositions visant à instaurer l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (article L.1142-1 du Code du travail). La prise en considération du sexe dans la rémunération ou lors de l'embauche constitue par exemple des atteintes à l'égalité professionnelle femmes-hommes. Dernier cas empêchant une entreprise de soumettre sa candidature à un marché : lorsque cette entreprise n'a pas conduit la négociation sur les objectifs d'égalité professionnelle entre les deux sexes, désormais obligatoire. Au titre de l'article L.2242-5 du Code du travail, l'employeur a le devoir d'organiser cette négociation qui porte notamment sur la formation professionnelle et la promotion professionnelle.
Ces nouvelles dispositions constituent des instruments pertinents pour lutter contre les discriminations mais elles ne sont pas sans conséquence, ni pour les pouvoirs adjudicateurs, ni pour les collectivités. En effet, un grand nombre d'entreprises ne respectent actuellement pas tout ou partie de ces dispositions, ce qui pourrait dorénavant leur fermer d'emblée la possibilité de soumissionner à un marché public.
Les acheteurs publics se posent aussi des questions. L'un d'entre eux a témoigné de ses inquiétudes en octobre dernier lors de la 167e session d'étude de l'Association pour l'achat dans les services publics (Apasp). Selon lui, ces nouvelles dispositions vont le conduire à devoir concilier les objectifs de recherche d'économies et de respect de la parité, ce second objectif étant susceptible de provoquer l'éviction de certains candidats et de limiter ainsi le choix du pouvoir adjudicateur.
En outre, en matière de commande publique, les procédures sont déjà lourdes et complexes. La mise en oeuvre de la loi risque de provoquer de nouvelles causes de recours contentieux. La charge de travail quotidienne ne devrait toutefois pas être amplifiée pour les collectivités, puisque ce sont les candidats qui devront fournir une attestation sur l'honneur certifiant qu'ils ne sont pas concernés par une interdiction de soumissionner.
Si certains pouvoirs adjudicateurs s'interrogent, d'autres ont pris de l'avance. Dès 2012, la ville de Lyon s'est ainsi engagée aux côtés d'autres partenaires - dont la ville de Nantes et la communauté urbaine de Nantes Métropole - dans le projet "Buydis" pour "développer des clauses dans les marchés publics contre les discriminations au travail" (voir ci-contre notre autre article de ce jour). Parmi d'autres actions mises en oeuvre à Lyon, les règlements de consultation des marchés indiquent désormais que, en cas d'égalité des notes, le choix se fera au regard de l'implication des candidats dans la lutte pour la parité.
Il y a d'autres aspects dans la loi du 4 août 2014 n° 2014-873 qu'il pourrait être utile de signaler.
Cordialement,
Patrick
Rédigé par : patrick | 22 janvier 2015 à 19:40