La pilule est amère pour les défenseurs du "manger local" : en commission des affaires économiques, le 2 mars, les sénateurs ont voté un amendement du sénateur UDI du Lot-et-Garonne Henri Tandonnet qui supprime l'objectif de 20% de produits bio dans la restauration collective fixé par la proposition de loi "favorisant l'ancrage territorial de l'alimentation".
L'article 1 de ce texte de la députée Brigitte Allain déjà voté en première lecture à l'Assemblée le 14 janvier fixait un objectif de 40% de produits locaux dans la restauration collective d'ici au 1er janvier 2020, dont 20% "issus de l'agriculture biologique". Sur pression de la FNSEA, cet objectif chiffré a sauté pour être remplacé par une mention beaucoup plus floue : "Une proportion de produits correspondant aux capacités de production locale est issue de l'agriculture biologique." La surface agricole utile cultivée en "bio" représentait fin 2014 moins de 5% du total en France. "Il est illusoire d'escompter une progression de la production en bio suffisante pour satisfaire, à échéance de 2020, l'objectif de 20% figurant dans la loi, sur la base de productions françaises", soutient Henri Tandonnet dans l'objet de son amendement. "Les opérateurs n'auront d'autre choix, pour caler leur offre sur l'objectif, que d'avoir recours à des produits d'importation, au détriment de la production française (…) De plus, imposer ce chiffre de 20% 'bio' dans l'objectif des 40% de produits relevant de l'alimentation durable reviendrait à dévaloriser les autres critères de cette alimentation tels que l'approvisionnement en circuits courts ou la saisonnalité des produits", argue-t-il encore.
Mais ce n'est pas tout. Le sénateur a également fait sauter une disposition de la proposition de loi qui permettait d'étendre le "fait maison" à la restauration collective à l'instar de ce qui se pratique dans la restauration commerciale depuis le 15 juillet 2014 pour mettre en valeur le savoir-faire artisanal du restaurateur. Pour Henri Tandonnet, le "fait maison" n'est pas adapté à la restauration collective. "La mention 'fait maison' permet au consommateur de choisir l'établissement dans lequel il souhaite se rendre, c'est donc un critère de différenciation. De ce point de vue, son extension à la restauration collective risque de fragiliser largement la mention", plaide-t-il.
La proposition de loi a été "chahutée", "sabotée", a réagi la députée Brigitte Allain, le 3 mars, en marge du Salon de l'agriculture. "C'est étonnant car les collectivités sont demandeuses, a-t-elle commenté. Il y a un peu de travail de communication à faire. Le chemin va continuer, cela ne nous arrête pas."
La proposition de loi est discutée aujourd'hui, mercredi 9 mars, au Sénat.
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