A l’occasion d’une convention de son parti sur les questions de défense, le président du parti Les Républicains, a cru bon de sonner une charge maladroite et assez malhonnête contre la politique de défense menée depuis 2012. A l’heure où notre pays fait face à des menaces sans précédent, cette pratique n’est pas seulement inédite en France de la part d’un ancien chef de l’Etat sur des questions de défense, elle est aussi irresponsable.
Nicolas Sarkozy n’éprouve manifestement aucune gêne à tordre la réalité en accusant le Président de la République d’être responsable d’un budget de la Défense « inférieur à celui de l’Allemagne pour la première fois depuis 1945». Celui qui a été chef de l’Etat – et donc chef des armées – ne peut pourtant ignorer que ce budget a connu une baisse continue depuis 2008, jusqu’à passer pour la première fois juste derrière celui de l’Allemagne… en 2012, soit en raison d’une programmation budgétaire décidée par lui-même !
Quant à la baisse des effectifs qu’il pourfend, comment peut-il ignorer qu’elle a été appliquée de manière aveugle sous son quinquennat, qui a vu disparaître 135 200 postes entre 2007 et 2012 et entérinée la suppression de plus de 45 000 postes dans la loi de programmation militaire 2009-2014 ?
Il serait honnête, de la part de celui qui prétend à nouveau assumer les plus hautes fonctions, de reconnaître que François Hollande a engagé dès sa première loi de programmation militaire 2014-2019 un ralentissement considérable de cette hémorragie. A la suite des attentats de 2015, le chef de l’Etat augmenté de 3,8 milliards d’euros le budget prévu par cette loi et préservé 18 750 postes sur les 34 000 suppressions prévues d’ici 2019.
Le président des Républicains serait autrement plus utile à son pays s’il cessait de dresser des comparaisons inappropriées et erronées avec l’Allemagne, nourrissant ainsi un sentiment de décrochage d’autant plus nocif qu’il est inexact : la France consacre 1,46% de son PIB aux dépenses de Défense, quand l’Allemagne se limite à 1,08%. C’est 490,7€ par an et par habitant en France contre 399,9€ en Allemagne. Nicolas Sarkozy prétend faire progresser les dépenses de défense jusqu’à 1,85% du PIB, soit un effort cumulé de 32 milliards sur 5 ans : dont acte. Mais il serait utile d’expliquer comment il compte s’y prendre tout en réduisant les dépenses publiques de 100 milliards d’euros sur un quinquennat.
Enfin, le Parti socialiste s’étonne des propos tenus par l’ancien président de la République au sujet de « l’incapacité du pouvoir actuel de mobiliser une coalition autour des forces françaises au Mali ». Pourtant, cette opération repose sur une coopération multi-étatique étroite avec le regroupement dit du « G5 Sahel » ainsi que sur un accroissement de contributions de l’Union européenne et des Etats membres pour la formation des armées de la région et au sein de la force onusienne de la MINUSMA. S’agit-il d’ignorance ou de malhonnêteté intellectuelle? De même, en comparant les opérations extérieures de la France à des « forces d’occupation ou de police », Nicolas Sarkozy feint de nier l’évidence : combattre le terrorisme djihadiste dans la bande sahélo-saharienne, en Syrie et en Irak, est une condition indispensable à la protection de la France et de l’Europe. Pour être efficace, cette action doit s’inscrire dans la durée.
En alliant malhonnêteté et maladresses, tout cela dans un objectif de polémique politicienne, Nicolas Sarkozy ne rend décidément pas service à la France et affiche bien des difficultés à se placer au niveau auquel les enjeux de sécurité et de Défense nous obligent aujourd’hui.
Marie RECALDE : secrétaire nationale à la défense
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