Au lendemain d'une réunion des ministres des finances du G20 à Paris, le communiqué des ministres publié samedi 19 février traduit une belle unanimité des grands argentiers des pays qui pèsent 85 % de la richesse de la planète. Il réitère leur volonté de relever les défis d'une crise qui continue de couver. Il confirme ainsi leur "engagement à coordonner (leur) action en matière de politique économique pour parvenir à une croissance forte, durable et équilibrée".
Mais en réalité, si la réunion n'a pas débouché sur un échec, c'est parce que la Chine a eu gain de cause in extremis en obtenant que, pour les travaux futurs du G20, ne soient pas pris en compte des indicateurs susceptibles de la stigmatiser, et notamment le montant de ses réserves (colossales) et le taux de change de sa monnaie (sous-évaluée).
Derrière cette querelle technique qui débouche sur un accord a minima se profile un début de débandade des membres du G20. Car la Chine n'est pas la seule à défendre bec et ongles ses intérêts sans considération pour les autres économies. En novembre 2010, pour éviter que l'économie américaine ne cale, la Réserve fédérale avait ouvert les vannes d'une politique monétaire extrêmement accommodante, qui avait eu pour effet de faire fuir des milliards de dollars vers le Brésil. Et tant pis si ce flux massif a mis en péril la stabilité économique et financière de celui-ci !
"Ferme du monde", le Brésil ne veut pas entendre parler de régulation des cours des matières premières agricoles : cela risquerait de réduire ses recettes d'exportation. Tant pis si ce juteux laisser-faire déclenche des catastrophes humaines en Afrique !
L'impressionnante solidarité que les Vingt avaient su bâtir face au danger est en train de s'effilocher. La crise semble passée, puisqu'il n'y aura plus guère de récession que dans quelques pays d'Europe et au Venezuela, en 2011. Les gouvernements se remettent à penser aux élections à venir et ne veulent pas paraître sacrifier les intérêts à court terme de leur économie. La tentation du chacun-pour-soi est de retour. Nicolas Sarkozy a prévenu, à juste titre, le 18 février, qu'y succomber sonnerait "la mort du G20".
C'est dire - n'en déplaise au président français - que l'objectif ultime de la France, qui le préside jusqu'en novembre , ne doit être ni la réforme du système monétaire international, ni la lutte contre la spéculation sur les matières premières, ni la régulation du système financier, ni la mise au pas des agences de notation, ni l'invention de nouvelles aides pour les pays pauvres mais bien la préservation de l'esprit de coopération planétaire, sans lequel aucun de ces ambitieux chantiers n'aboutira. A défaut, la crise serait alors promise à un bel avenir.
Source : Le Monde
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