Les députés ont mis au point mardi les modalités pratiques de la procédure de destitution du chef de l’Etat, qui découlent de la réforme constitutionnelle de 2007 mais qui n’avaient pas encore été définies.
Le projet de loi organique a été voté par 294 voix contre 32. Le PS s’est abstenu et le Front de gauche a voté contre.
En 2007, la réforme constitutionnelle a fait disparaître la vieille notion de "haute trahison" pour établir une immunité pendant le mandat, mais instauré une possible "destitution" en cas de "manquement manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat".
Cette procédure serait alors déclenchée devant le Parlement réuni en "Haute Cour". Celle-ci, présidée par le président de l’Assemblée nationale, "statue dans un délai d’un mois, à bulletins secrets, sur la destitution". Sa décision, devant être prise à la majorité des deux tiers, est à effet immédiat.
En commission, certains députés UMP, comme Dominique Perben ou Claude Bodin avaient lancé un appel à la vigilance, craignant "des risques de déstabilisation par des majorités de circonstance", qui en profiteraient pour renverser le président pour des raisons politiques.
Candidat centriste à la présidentielle, François Bayrou, avait, lui, mis en garde contre un risque de "dévoiement" de la procédure.
Mardi, Patrick Calméjane (UMP) a expliqué que son groupe votait ce texte "sans réserve". "Nous ne pouvons que nous satisfaire de l’équilibre qu’apportera ce projet de loi. La nouvelle procédure de destitution (…) ne permettra la mise en cause du chef de l’Etat que dans des circonstances exceptionnelles par la représentation nationale".
Au Nouveau Centre, Michel Hunault a jugé le texte "équilibré" et "entouré des garanties nécessaires".
Le PS a profité du débat pour redire qu’il aimerait revoir le statut pénal du chef de l’Etat.
Jean-Jacques Urvoas (PS) a ainsi rappelé qu’il prônait une responsabilité pénale, devant les juridictions de droit commun, pour "les actes détachables de sa fonction".
Selon le projet de loi organique voté mardi, la proposition de résolution pour réunir la Haute Cour doit recueillir la signature "d’au moins un dixième des membres de l’Assemblée" devant laquelle est déposée la proposition.
Lors de l’examen en commission, les députés ont modifié le filtre par lequel doivent passer ces propositions de résolutions. Initialement, c’était à la commission des Lois de jouer ce rôle, mais un amendement l’a confié à l’organe exécutif de chaque chambre (bureau).
Jean-Jacques Urvoas a mis en garde contre un "contrôle d’opportunité" que pourrait constituer la recevabilité par le bureau de chaque chambre.
Pour le Front de gauche, Marc Dolez a marqué un profond désaccord. "Vous vous êtes appliqués à cadenasser le dispositif mais la destitution est, surtout, parfaitement en décalage avec l’esprit de la Ve République, qui n’a cessé depuis 1962 d’affirmer son caractère de monarchie républicaine".
Et de fustiger que le texte ait attendu cinq ans pour être adopté : "Nicolas Sarkozy aura ainsi réussi à bénéficier pendant tout son mandat du volet protecteur de la réforme de 2007, c’est-à-dire l’immunité, sans que sa majorité ne se penche sur les modalités d’application de la procédure de destitution", a-t-il dit.
Source : Afp
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