Le projet de loi de modernisation agricole (LMA), adopté par l’Assemblée Nationale le 6 juillet dernier, n’a pas manqué de décevoir les principaux acteurs concernés par le texte.
Ce projet de « modernisation », qui avait pour objectif d’en terminer avec de nombreux archaïsmes, se révèle être en vérité un pacte de libéralisation de la filière agricole.
Loin de garantir aux agriculteurs un revenu qui leur permette de vivre dignement de leur travail, comme l’avait pourtant promis le ministre de l'Alimentation, de l'Agriculture et de la Pêche a priori des discussions, la mesure phare du projet de loi est la mise en place d’une contractualisation entre les agriculteurs et les professionnels de l’agroalimentaire.
La forme de ce contrat « personnalisé » exclut toute régulation nationale et assure la mainmise de l’industrie agroalimentaire, qui pourra choisir de ne pas travailler avec telle ou telle exploitation jugée moins rentable que les autres. Autrement dit, c’est un bon moyen pour la distribution de s’assurer de la fourniture de marchandises, tout en poussant les agriculteurs dans une précarité sans précédent !
Mais les déceptions ne se limitent pas à cette unique mesure. En refusant la régulation par filière au niveau national, la loi entérine d’autres archaïsmes : absence de dialogue social en agriculture, disparition progressive des circuits courts (dont les nécessités sociale et écologique sont pourtant évidentes), volatilité des prix et flexibilité des revenus des agriculteurs, développement de monocultures, implantations sans évaluation environnementale ni consultation du public…
Par ailleurs, de nombreux thèmes, pourtant essentiels, ont été écartés des débats : l’aménagement du territoire (au profit d’un mouvement de concentration), les aides aux jeunes agriculteurs ou la question des DOM-TOM.
Le bilan est amer tant pour les exploitants que pour les consommateurs.
Un projet juste aurait promu, entre autres, la gestion publique des marchés alimentaires agricoles et la relance de la compétitivité de nos filières agricoles, en instaurant des politiques de quotas, de subventions publiques, de droits à produire et de régulation des stocks, afin d’éviter la volatilité des prix, la précarité des revenus agricoles, les circuits longs et les dérives productivistes.Audrey Bourget
Source : lemonde.fr
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