Un message ? Quel message ? Au lendemain d’élections cantonales très rudes pour l’UMP, le gouvernement n’entend en rien modifier ses projets de réforme de la fiscalité du patrimoine et tout particulièrement de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Il est appuyé par une bonne partie de sa majorité, même si quelques voix continuent de plaider la prudence.
“Rien ne change. C’est une réforme annoncée pour juin”, fait-on valoir à Bercy. Le projet du gouvernement sera finalisé dans les semaines qui viennent. Sa présentation en conseil des ministres est prévue mi-mai. Deux options sont sur la table : alléger l’ISF ou le supprimer pour le remplacer par un impôt sur les revenus de la fortune (IRF), qui consisterait à taxer la variation de la valeur du patrimoine (les plus-values latentes).
Dans les deux cas, environ 300 000 personnes (sur 560 000 redevables actuellement) sortiront du champ de l’impôt sur le patrimoine : ce sont celles disposant d’un patrimoine compris entre 800 000 euros et 1,3 million d’euros. Le bouclier fiscal sera également supprimé.
“Il faut avancer plus que jamais”, assure Jean Arthuis, président (Union centriste) de la commission des finances du Sénat, qui, à l’appui de cette conviction, fait valoir que “l’abstention et le vote FN sont l’expression d’une protestation et d’un désenchantement et traduisent le sentiment des Français qu’au-delà des annonces il y a une impuissance politique à faire”.
“Il n’y a pas lieu de surseoir à ce débat sur la fiscalité, c’est un débat légitime”, avance lui aussi le député (UMP) Hervé Mariton, selon qui “le besoin de reconquête de crédibilité et d’autorité pour la majorité doit conduire à une mise en oeuvre de cette réforme dès 2011″.
“Surseoir ? Certainement pas”, répond également Philippe Marini. Le rapporteur général (UMP) du budget au Sénat met notamment en avant le caractère “départemental” des élections des 20 et 27 mars : “les électeurs ne se sont pas prononcés sur des questions de fiscalité et de patrimoine”, déclare-t-il.
“Le résultat des cantonales ne s’explique certes pas par le seul projet de réforme de l’ISF, mais ce dernier, en étant lancé quelques semaines seulement avant ce scrutin, n’aura pas aidé les candidats de l’UMP”, relève pourtant Jérôme Fourquet, directeur adjoint du département Opinions l’Ifop.
Les études récentes de cet institut de sondage montrent qu’environ deux tiers des Français sont opposés à une réforme de l’ISF. La proportion atteint les trois-quarts chez les ouvriers et employés. Elle est d’un tiers chez les sympathisants UMP eux-mêmes.
“La réforme de l’ISF, c’est le type de mesure qui creuse un peu plus le fossé entre l’UMP et l’électorat populaire, celui qui avait voté Sarkozy en 2007, mais pour qui le discours sur l’urgence d’une réforme de l’ISF est inaudible, alors qu’il est confronté aux hausses des prix et aux problèmes d’emploi”, souligne M. Fourquet.
“Cela renforce, ajoute-t-il, l’image d’un parti qui travaille au service d’une seule partie de la population, la plus aisée, d’autant qu’il ne se s’agit pas de la première mesure de ce type” depuis 2007.
“J’espère que le résultat de dimanche fera entendre raison à ceux qui veulent une suppression totale de l’ISF”, considère quant à lui Gilles Carrez, rapporteur général (UMP) du budget à l’Assemblée nationale.
“Supprimer totalement l’ISF serait un signal très mauvais avant 2012, ajoute le député, qui plaide pour un simple allégement de l’ISF dans l’immédiat. Ce type de réforme, c’est en début de mandature qu’il faut le faire et en ayant fait toute la pédagogie nécessaire avant”.
Source : Le Monde
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