L'annonce de la réduction de la liste des métiers ouverts aux étrangers est, selon le PS, une diversion pour ne pas parler des échecs du gouvernement. Syndicats et patronat sont également critiques.
La décision du gouvernement de réduire le recours aux travailleurs étrangers a suscité, lundi 18 avril, un tollé du côté du Parti socialiste et des syndicats. Ils dénoncent un discours anti-immigration. La chef de file du patronat Laurence Parisot, davantage sur la réserve, plaide pour un pays "ouvert".
Le ministre du Travail, Xavier Bertrand, a annoncé la veille son intention de réduire la liste des "métiers en tension", pour lesquels les employeurs ont du mal à trouver des candidats adéquats et peuvent recruter des immigrés. Il veut donner la priorité à "la formation" des chômeurs français pour occuper ces postes. Le ministre reconnaît toutefois que la mesure concerne peu de monde: l'immigration liée au travail représente "à près 20.000 personnes" par an. Un arrêté de 2008 définit pour chaque région une liste de métiers - une trentaine au total - ouverts aux étrangers: il s'agit pour l'essentiel de professions qualifiées et techniques- informaticiens, géomètre, opérateur de formage du verre, contrôle comptable - et aussi liés au secteur BTP. Pour certains pays (Tunisie, Sénégal), la liste est plus large.
A un an de l'élection présidentielle et en pleine controverse sur l'immigration, l'annonce a déclenché l'ire du PS. Sur Le Post, le secrétaire national PS à l'Emploi, Alain Vidalies, a ainsi estimé que "cette annonce de Xavier Bertrand s'inscrit dans le discours ambiant et l'offensive anti-immigration de Claude Guéant et de Nicolas Sarkozy. On est dans le même moule idéologique de stigmatisation des étrangers."
Au-delà de cette interprétation politique, Alain Vidalies comme le patronat juge que cette annonce "n'a aucun intérêt pour le marché du travail". Rappelant qu'il y a "quatre millions de demandeurs d'emploi", il s'étonne que "le gouvernement s'intéresse à un problème qui concerne 22.000 personnes".
Et Alain Vidalies de pointer la responsabilité du ministre du Travail : "Quand il dit que c'est de sa responsabilité de former les demandeurs d'emploi pour occuper les postes disponibles, Xavier Bertrand constate son propre échec car, en tant que ministre du Travail, c'est lui qui a la responsabilité de la formation professionnelle."
Les syndicats ne sont pas d’un avis différent. "C’est une façon déguisée de faire du discours contre l'immigration", a accusé le secrétaire général de la CFDT François Chérèque. Son homologue de FO Jean-Claude Mailly dénonce de son côté un "discours dangereux" qui "dans le contexte actuel sent mauvais". "On voit que le gouvernement est en campagne, il multiplie l'annonce de mesures tendant à faire plaisir à l'électorat du Front National", affirme à l'AFP Mourad Rabhi de la CGT. Selon lui, "même s'ils durcissent cette liste, cela n'aura aucun impact et ne répondra en rien à la problématique du chômage en France".
Selon une estimation de Pôle emploi, quelque 250.000 postes en 2010 sont restés sans preneurs pendant un an. L'enquête "Besoin de main d'œuvre" de Pôle emploi, publiée en avril, révèle que plus du tiers (37,6%) des embauches projetées par les employeurs en 2011 butent sur des difficultés de recrutement. Mais à près de 40% les emplois offerts sont saisonniers. Et parmi les profils recherchés, outre les informaticiens, il s'agit en majorité de métiers souvent mal rémunérés (cuisiniers, serveurs, aides ménagères, emplois de maison, infirmiers, agents de sécurité). Professions qui ne correspondent pas à celles ouvertes aux immigrés. D'ailleurs, seuls 18% des patrons rencontrant des difficultés de recrutement songent à faire appel à des personnes de l'étranger, selon cette enquête. Les autres prévoient de former des candidats.
Source : Nouvelobs.com
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