La gestion du Conseil économique et social (CES) a été "gravement" mise en cause vendredi devant la Cour de discipline budgétaire et financière où quatre de ses anciens responsables, parmi lesquels Jacques Dermagne, ex-président, répondaient "d'irrégularités" autour d'un marché public.
L'organisation du CES, "gravement défaillante", rendait "inévitable" que se produise un "accident" dans sa gestion, a déclaré l'avocat général Jean-François Bénard.
Présidée par le premier président de la Cour des comptes Didier Migaud, cette discrète juridiction administrative juge des fautes personnelles d'ordre financier commises dans l'exercice de leurs fonctions par des fonctionnaires.
Les quatre prévenus, parmi lesquels figurait aussi un ex-secrétaire général du CES, Patrice Corbin, devenu magistrat de la Cour des comptes et jugé ainsi dans les locaux de la Cour et par ses pairs, devaient répondre "d'irrégularités" remontant aux années 2004 à 2007.
Celles-ci porteraient sur l'attribution pour un montant total de 422.000 euros d'une mission d'audit à un cabinet de conseil privé chargé précisément d'expertiser le fonctionnement du CES.
Mais au-delà de cette affaire, l'avocat général a dénoncé le "flou" entourant le fonctionnement de cette institution "consultative de la République" à l'utilité souvent contestée, devenue en 2008 le Conseil économique, social et environnemental (CESE).
Dans ses réquisitions, Jean-François Bénard a parlé d'une réglementation interne du CES "évanescente", jugeant que "l'absence de sérieux" des procédures de contrôle financier n'était "pas acceptable".
L'avocat général a requis 3.000 euros d'amende contre Patrice Corbin, présenté comme le "principal responsable des irrégularités" et qui aurait ignoré les avertissements de ses services, et 700 euros contre Jacques Dermagne, absent car souffrant, auquel il a reconnu des "circonstances atténuantes".
Il n'a demandé en revanche que 300 euros contre les deux autres prévenus, Bernard Devy et Francis Vandeweeghe, anciens questeurs du CES, jugeant leur responsabilité plus atténuée encore.
"Nous avions des lignes budgétaires officieuses", a reconnu Patrice Corbin. Selon lui, un appel d'offres en bonne et due forme révélant l'objet de l'audit aurait provoqué une "révolution" au sein d'un personnel "très bien payé et ne travaillant pas tant que cela".
L'ancien secrétaire général du CES a reconnu avoir "caché" au président de l'institution comme aux deux questeurs qui comparaissaient à ses côtés la finalité de l'audit qu'il avait lancé : "supprimer 30% des emplois administratifs".
Son objectif, s'est-il défendu, était aussi de dépoussiérer une "structure très endogamique et complexe (...) où les gens se marient entre eux et restent 40 ans".
Bernard Devy a plaidé pour sa part la "bonne foi" assurant avoir "pensé que toutes les règles étaient respectées". Quant à Francis Vandeweeghe, il a admis "peut-être un défaut de vigilance", soulignant que tous deux avaient pris leurs fonctions alors que "le coup était déjà parti". Depuis, a-t-il également souligné, trois fonctionnaires du Conseil sont affectés aux marchés publics.
Contestant le fond comme la forme des poursuites, les avocats des quatre prévenus ont demandé leur relaxe. L'arrêt de la cour a été mis en délibéré à une date non précisée.
Interrogé par l'AFP, Christian Le Roux, directeur de cabinet de l'actuel président du CESE, Jean-Paul Delevoye, a indiqué que ce dernier avait demandé "dès son élection en novembre 2010 un contrôle de la Cour des comptes".
Les procédures internes ont par ailleurs été réformées "dans un souci de transparence et d'efficacité", le budget ayant été présenté pour la première fois lors d'une séance publique en février, a-t-il indiqué.
Source : Afp
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