Le mouvement Terre de liens, fondé il y a dix ans pour faciliter l'accès aux terres des agriculteurs, a dévoilé le 7 octobre les contours d'une fondation qui ouvre la voie à des montages innovants avec les collectivités.
A partir d'un fonds de dotation, Terre de liens a fait évoluer son mode de collecte de dons (sous forme d'argent, de terres, de fermes) et d'accompagnement dans l'acquisition et la transmission de fermes, en une fondation reconnue d'utilité publique. "Créer cette fondation fut un parcours du combattant", résume son directeur, Jérôme Deconinck. Atteindre le seuil minimal de dotation exigé d'un million d'euros et donner le gage de la pérennité de la structure dans le temps, a fortiori quand on est comme c'est le cas ici sous une double tutelle ministérielle (Agriculture et Ecologie), n'a en effet rien d'évident. Mais sa création est actée – un décret paru en mai l'atteste – et ses débuts prometteurs. Il faut dire que le contexte, en quelques années, a changé. Ce que confirme Michel Vampouille, administrateur de Terre de liens Ile-de-France et ancien élu du conseil régional : "Il y a dix ans, le désintérêt des élus pour le foncier agricole était profond. Mais la montée de la périurbanisation et du phénomène de grignotage des terres les plus fertiles en ont sensibilisé plus d'un. Les mentalités ont changé et désormais, rares sont les élus qui ne s'en préoccupent pas et pensent qu'il n'y a rien à tirer de ces espaces.
Du point de vue des collectivités, ce changement de statut ouvre la voie à des montages plus matures et sécurisants lorsqu'elles cherchent un levier de maîtrise foncière de terres agricoles, sans néanmoins les détenir et les gérer en propre, ce que nombre d'entre elles n'ont pas les moyens de faire. Car si les élus ne manquent pas de projets, la crainte de l'alternance politique et d'un changement de mandat leur coupe souvent l'herbe sous le pied. "Par-delà les aléas des mandats, la structure même de la fondation est adaptée au temps long de l'aménagement des territoires", relève ainsi Jean Le Monnier, président de cette fondation.
"En tout, nous avons acquis 89 fermes dont 5 par le biais de donations, et ce non par opportunité foncière mais toujours en lien avec un porteur de projet et un besoin territorial, en travaillant pour ce faire avec les associations de développement rural, les chambres d'agriculture, les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer) qui régulent tandis que nous investissons, bref tout un tissu auquel se surajoutent les collectivités et le monde de l'économie sociale et solidaire (ESS), dont nous sommes issus", détaille Jérôme Deconinck. Pour les collectivités donc, plus besoin de s'interroger sur la création d'un établissement assurant la maîtrise foncière, puisque cette fondation leur propose de s'en charger. En contrepartie de fortes garanties : donation d'un bien en propriété ou subvention d'investissement pour l'achat de terres ou d'une ferme ciblée sont garanties par acte notarié et contrôle de l'Etat, la protection environnementale des terres confiées est sécurisée via des clauses environnementales systématiquement insérées dans les baux passés avec les fermiers choisis par Terre de liens, garantie de non-spéculation sur les terres qui ne seront jamais revendues ou morcelées, etc. La collectivité peut aussi poser ses conditions sur le type d'agriculture pratiquée. Autre montage intéressant les collectivités, actuellement négocié avec deux régions, et qui devrait être dévoilé le 29 novembre lors d'une présentation de l'outil à la Fondation Macif (Paris) : la possibilité d'attribuer [à la fondation Terre de liens, qui se charge du reste] une enveloppe d'investissement dédiée à un territoire pour construire un programme pluriannuel d'acquisitions" en vue d'une conservation pérenne des espaces agricoles.
source : localtis
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