Cette audition se tient dans le cadre d’un futur rapport de la commission de la Défense sur la question des réserves.
Dans le cas de la gendarmerie, la réserve est devenue indispensable à sa performance opérationnelle. Au cours des dernières années, un basculement s’est opéré : d’une force d’appoint ponctuelle, les réservistes sont devenus un renfort permanent. Ces derniers sont pleinement intégrés aux manœuvres des unités d’active.
Le réserviste, après avoir été sélectionné parmi les candidats, débute une formation militaire de gendarmerie de 15 jours durant laquelle il va apprendre à marcher au pas, à tirer, à interpeller quelqu’un etc. A l’issue de celle-ci il signe un contrat qui lui permet d’être employé. Chaque réserviste peut, s’il souhaite monter en grade, passer le diplôme d’aptitude à la réserve (DAR) puis le diplôme d’adjoint de police judiciaire (APJA). Il peut également suivre la préparation militaire supérieure gendarmerie (PMSG) pour devenir officier de réserve.
Le dispositif s’est progressivement adapté à l’implantation territoriale de la gendarmerie – qui est présente sur 95% du territoire – ainsi qu’à l’évolution de ses missions et de ses moyens. Une gestion très fine à l’échelle régionale et départementale a été mise en place avec le logiciel Minotaur qui permet, via une connexion directe entre réservistes et gestionnaires, souplesse et réactivité. En effet, les réservistes entrent leurs disponibilités dans le logiciel, ce qui permet au gestionnaire d’adapter le recrutement pour chaque mission en fonction des compétences et du taux d’emploi de chacun. Cela permet également une grande réactivité puisqu’en cas d’urgence le gestionnaire peut contacter un réserviste en 10 minutes et ce dernier peut répondre instantanément.
Il existe également une réserve dite de second niveau constituée de 28 000 personnes retraitées de la gendarmerie qui sont astreintes de répondre à une convocation durant les 5 ans suivant leur cessation d’activité.
Effectifs
Près de 1 300 réservistes viennent renforcer au quotidien les forces d’active de la gendarmerie. Le volume des unités de réserve est calculé au prorata de celui des effectifs d’active de façon à avoir une répartition adéquate sur le territoire, certains départements étant plus sollicités que d’autres (de 158 à 533 réservistes par département selon le cas). Aujourd’hui, ils sont environ 24 000 hommes et femmes à faire partie du dispositif.
Celui-ci participe directement au lien armée-nation puisque 70% des réservistes sont issus du milieu civil. Les 30% restant sont d’anciens gendarmes ou militaires. 15% des recrutements de sous-officiers de la gendarmerie proviennent de réservistes, et la demande étant supérieure à l’offre, cela assure une meilleure sélection. Les femmes représentent 20% des effectifs de la réserve, ce qui s’explique par le fait que parmi les 30% de retraités recrutés, ces derniers sont essentiellement des hommes, la féminisation de la gendarmerie n’ayant débuté que dans les années 1970. Pour les civils, il y a autant de filles que de garçons qui sont recrutés.
La forte présence de la gendarmerie sur le territoire est propice au recrutement au sein du dispositif. Interrogé par M. le député Daniel Boisserie sur d’éventuelles difficultés en matière de recrutement en milieu rural, le général Coroir explique que les manques d’effectifs d’un département sont compensés par ceux du voisin.
Suite à la question de Mme Geneviève Gosselin-Fleury relative aux effectifs de la réserve citoyenne au sein de la gendarmerie, le général répond qu’il y a actuellement 1 300 réservistes citoyens sur 3 500 pour l’ensemble des forces armées. Il rappelle également que le directeur général de la gendarmerie ne souhaite pas aller au-delà de ce volume pour privilégier l’expertise de certains volontaires.
Budget
Il n’y a pas de budget spécifique dédié à la réserve : c’est le directeur de la gendarmerie qui décide sur le budget de cette dernière, la part qu’il y consacrera. La dotation affectée en début d’année est toujours inférieure aux besoins réels, c’est pourquoi le budget est abondé en cours d’année. Ainsi en 2014, la dotation initiale était de 31 M € et a atteint 40 millions € à la fin de l’année. En 2015, le budget initial est fixé à 32 M €. Une contribution spéciale peut être attribuée dans le cas où le directeur général de la gendarmerie décide de lancer une manœuvre à l’échelle nationale. Le budget des réserves est ensuite ventilé entre les 22 régions et l’outre-mer puis entre les départements, et enfin entre les groupements qui les gèrent ensuite à leur guise et selon une planification annuelle tenant compte des événements prévisibles. Même si le général Coroir se déclare satisfait du budget du dispositif, il met tout de même en avant des insuffisances en matière d’équipement des réservistes.
L’étroit maillage du territoire par les casernes assure une réduction importante des coûts puisque cela diminue d’autant plus les déplacements. Le coût unitaire journalier d’un réserviste est relativement faible puisqu’il s’élève à 83 € en moyenne. Cela s’explique par le fait que le recrutement concerne essentiellement des grades subalternes, et moins les sous-officiers et officiers, plus coûteux.
Missions
Les réservistes sont sollicités dans le cadre d’un plan national de lutte contre les atteintes aux biens lancé par le directeur général de la gendarmerie. Ils participent également à assurer la sécurité dans les ZSP (Zones de sécurité prioritaires), les zones d’affluence saisonnière et patrouillent dans les trains en vertu d’un partenariat signé avec la SNCF. En outre, la réserve fait partie intégrante du plan Vigipirate et a reçu à ce titre une enveloppe de 8 M €.
Suite à une question de M. Philippe Nauche, le général Coroir se prononce contre une possible transposition du dispositif de la gendarmerie vers une réserve opérationnelle plus militaire, parce qu’il juge que cela extrairait les réservistes d’un système intégré de proximité qui limite au maximum les risques.
Enjeux actuels
L’enjeu actuel de la gendarmerie est aujourd’hui de fidéliser ces réservistes ce qui permet de réduire les coûts, en formation notamment. Pour atteindre cet objectif, une stratégie portant sur 3 points a été mise en place : effectif, budget et taux d’emploi moyen annuel de chaque réserviste. Il s’agit en fait d’employer suffisamment les réservistes chaque année et de leur offrir des missions intéressantes afin de les fidéliser. Le bon niveau d’emploi fixé est de 20 jours par an et par réserviste, mais cela peut varier de 5 à 80 pour certains. Cela passe également par un recrutement raisonné afin de garantir ce taux d’emploi moyen : il y a 24 000 réservistes alors que le plafond fixé par le directeur général de la gendarmerie est de 30 000.
En matière de fidélisation, la situation est bonne puisque la durée moyenne de contrat est passée de 3 ans en 2011 à pratiquement 5 aujourd’hui.
Rédaction : Guillaume MURE, étudiant à Sciences-Po, stagiaire auprès de Guy Chambefort à l'Assemblée nationale.
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