Présenté en Conseil des ministres le 19 mars, le projet de loi relatif au renseignement est en examen à l’Assemblée nationale à partir du 13 avril. Écoutes, surveillance numérique, entraves aux libertés publiques … le texte fait l’objet de nombreuses rumeurs et d’autant de fantasmes. Le Vrai/Faux du Gouvernement fait le point sur les infos et les intox sur ce projet de loi essentiel à notre démocratie.
1. Le projet de loi offre des moyens supplémentaires aux services de renseignement
Le projet de loi a pour principal objectif de tenir compte de la réalité de la menace et des méthodes employées par les réseaux terroristes ou d’espionnage international. C’est également un moyen de conserver des services de renseignement performants. C’est un enjeu de souveraineté pour la France. Il n’était pas possible d’en rester à la loi de 1991, conçue à une époque où la téléphonie filaire était le seul moyen de communication à distance.
2. Le Gouvernement met en place une surveillance massive des données sur Internet
Le projet de loi ne modifie rien au principe du secret des correspondances et à ses limitations actuelles en matière de communications électroniques. Dans le seul objectif de combattre le terrorisme, le projet de loi prévoit l’analyse automatique des données de connexion, afin de pouvoir détecter des comportements caractéristiques des terroristes sur internet. L’anonymat des usagers sera préservé. Le contenu des messages ne fera l’objet d’aucune surveillance. Ces dispositifs seront mis en œuvre en concertation avec les opérateurs de télécommunications, par un service dépendant du Premier ministre et sous le contrôle étroit de la commission de contrôle. Les services de renseignement n’auront donc pas d’accès direct aux réseaux des opérateurs de télécommunications et ne seront pas directement rendus destinataires des résultats obtenus.
3. Le Gouvernement met en place un dispositif massif d’interception des conversations privées
Les interceptions de conversations téléphoniques ne concerneront que des personnes nommément désignées, y compris lorsqu’elles seront effectuées par le biais d’un appareil dénommé "IMSI-catcher". En outre, leur nombre restera contingenté. Pour mémoire, il est de 2 700 aujourd’hui alors qu’environ 35 000 interceptions judiciaires sont réalisées chaque année et que la France comptait plus de 78 millions d’abonnés à des services mobiles en juin 2014. Le même principe d’autorisation individuelle et préalable s’appliquera pour les interceptions de communication internationales, dès lors qu’elle est émise ou reçue en France. Les droits des citoyens sont parfaitement garantis.
4. La commission de contrôle sera indépendante et disposera des moyens suffisants pour assurer sa mission
Autorité administrative indépendante, la future CNCTR comprendra des magistrats, des parlementaires et un ingénieur spécialiste de l’informatique et du numérique. Elle verra également ses moyens en personnels renforcés. Sauf dans de rares cas d’urgence (cf. affirmation n°7), elle formulera toujours un avis préalable et pourra exercer son contrôle pendant et après la mise en œuvre de la technique de renseignement. Elle disposera enfin du pouvoir de saisir le Conseil d’État.
5. Le juge sera absent de la procédure de contrôle
Pour la première fois en droit français, ce projet de loi ouvre la possibilité d’un recours pour tous les citoyens qui estiment faire l’objet d’une surveillance illégale. Ce recours s’effectuera devant le Conseil d’État. Pour la première fois également, ce projet de loi crée une procédure dans laquelle le secret de la défense nationale ne pourra pas être opposé au juge qui souhaiterait connaître les raisons d’une surveillance. Enfin, des magistrats de l’ordre judiciaire et administratif siégeront à la CNCTR et ils auront un rôle renforcé pour les mesures de surveillance qui nécessitent l’intrusion dans un domicile.
6. Le champ des finalités justifiant le recours aux techniques de renseignement est trop large
Le Gouvernement a souhaité préciser ce que recouvrait la notion très large de "sécurité nationale". L’énumération des finalités permet de dire précisément dans quels domaines les mesures de surveillance sont possibles, et dans quels domaines elles sont interdites. Ainsi, le suivi des partis politiques, des syndicats ou des mouvements défendant pacifiquement certaines causes est clairement proscrit. Cette énumération précise permettra à la CNCTR d’établir une doctrine plus solide. C’est donc un moyen de renforcer le contrôle. La France se distingue de ses voisins, qui emploient des notions beaucoup plus larges, tel le "bien-être économique de la Nation" au Royaume-Uni.
7. Les procédures d'urgence sont indispensables
Parce que la menace est souvent imprévisible, les services doivent pouvoir réagir très rapidement en certaines circonstances. C’est le cas, par exemple, lorsqu’un individu surveillé rencontre d’autres complices qui n’étaient pas connus. Il faut alors pouvoir réagir en temps réel, sur le terrain. Mais là encore, un contrôle très strict sera exercé : le compte-rendu à la commission de contrôle sera immédiat et la procédure devra être régularisée par écrit et de manière motivée dans les 24 heures. Sinon, la surveillance sera interrompue et les données recueillies effacées. Une procédure d’urgence absolue est également prévue dans l’hypothèse où aucun membre de la commission ne serait joignable pour formuler un avis. Cela sera sans doute exceptionnel mais c’est indispensable pour que l’action gouvernementale ne soit pas paralysée, en particulier en cas de crise majeure.
8. Les services de renseignement pourront agir sans autorisation
Ce projet de loi soumet l’ensemble des mesures de surveillance technique à un contrôle politique et juridique. Sauf dans des cas très limités d’urgence opérationnelle (cf. affirmation n°7), les services de renseignement devront, pour mettre en œuvre une technique, obtenir l’aval d’autorités politiques qui rendent compte de leur activité devant le Parlement. Ces autorités politiques doivent elles-mêmes prendre l’avis d’une commission indépendante, laquelle disposera de moyens de recours juridiques.
9. Certaines professions bénéficieront d’un statut protecteur
Compte tenu de leurs missions et du secret qui doit entourer certaines de leurs activités, un certain nombre de professions bénéficieront de garanties supplémentaires. Ce sera le cas des avocats, journalistes, magistrats et parlementaires. Ainsi, l’avis de la commission sera obligatoire, aucune procédure d’urgence ne sera mise en œuvre les concernant et la commission de contrôle veillera à la préservation des secrets attachés à l’exercice de ces professions. Certains individus pourraient être tentés de se dissimuler derrière ces professions pour échapper à la surveillance des services de renseignement ; c’est pourquoi il ne peut être envisagé une interdiction absolue de mise en œuvre des techniques de renseignement pour ces professions.
10. La loi actuelle protège mieux les libertés individuelles
Les lois en vigueur (lois du 10 juillet 1991 et du 18 décembre 2013) ne réglementent que 2 techniques : les interceptions de sécurité (écoutes administratives) et l’accès aux données techniques de connexion (identification de numéros de téléphone, liste des appels passés ou reçus par une personne faisant l’objet d’une enquête). Aucun cadre juridique n’existe donc pour les autres techniques. Par ailleurs, en l’état actuel du droit, aucune de ces deux techniques n’exige d’avis préalable de la commission de contrôle (CNCIS) et aucun contrôle des décisions par le juge n’est prévu.
11. La procédure accélérée nuit à la transparence de l'examen du projet de loi
Le projet de loi renseignement est présenté dans des conditions de transparence très larges. La procédure accélérée ne change rien aux travaux parlementaires ni à la forme du projet de loi : comme pour tout texte de loi, il comporte un exposé des motifs, une étude d’impact. Les commissions saisies dans le cadre du travail parlementaire procèdent à des auditions publiques. La délégation parlementaire au renseignement en a également été saisie. La procédure accélérée prévoit simplement qu’après une lecture à l’Assemblée nationale et une lecture au Sénat, et en cas de désaccord entre les deux chambres, la commission mixte paritaire se réunit. La procédure normale prévoit qu’il y ait deux lectures dans chaque chambre. Enfin, l’avis rendu par le Conseil d’État sur ce projet de loi est public. C’est le premier exemple de publicité des avis, après la décision du président de la République annoncée le 20 janvier, lors des vœux aux corps constitués.
Monsieur le Député
Si nous ne mettons pas en doute l'objectif du gouvernement actuel de lutter contre le terrorisme tout en préservant la liberté de chaque citoyen. Toujours est-il qu'une loi comme celle-là dans d'autres circonstances et un gouvernement un peu moins Républicain et citoyen que celui de François Hollande (il y a en dans le paysage politique actuel....notamment la droite dure et le FN..) pourrait vite déraper vers un élargissement de ce qu'est le terrorisme (Bush et son Patriot act) .Merci de nous rassurer..En tout cas la presse internationale Européenne semble s'alarmer
Respectueuses salutations
Rédigé par : Baroni | 17 avril 2015 à 13:44
Monsieur,
Soucieuse de garantir les libertés individuelles, l’Assemblée nationale a considérablement enrichi le projet de loi relatif au renseignement : accroissement des pouvoirs et capacités de contrôle de la Commission nationale de contrôle des techniques de recueil du renseignement (CNCTR), renforcement de la procédure d’autorisation de mise en œuvre des techniques, renforcement des conditions d’indépendance des membres de cette autorité administrative indépendante, création d’un statut de lanceur d’alerte afin de pouvoir révéler les illégalités commises, etc. En commission des Lois, comme en séance publique, de très nombreux amendements ont été adoptés, en provenance de tous les groupes politiques, afin de renforcer les garanties initiales figurant dans le texte gouvernemental.
Sincères salutations.
Rédigé par : Guy Chambefort | 21 avril 2015 à 09:15