La direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) des ministères sociaux publie, dans la dernière livraison de ses "Cahiers de la Drees", une étude sur l'impact redistributif de deux dispositifs destinés à faciliter l'accès aux soins des personnes à revenus modestes ou très modestes : la CMU complémentaire (CMU-C) et l'aide à l'acquisition d'une complémentaire santé (ACS). Le titre de l'étude ne laisse pas d'ambiguïté sur les conclusions : "La CMU-C et l'ACS réduisent les inégalités en soutenant le pouvoir d'achat des plus modestes".
Des profils très voisins
L'enjeu est de taille, puisque 5,5 millions de personnes bénéficient de ces prestations en France métropolitaine (chiffres 2014). Le coût de ces deux dispositifs reste relativement modeste au regard du nombre de personnes couvertes, avec un total de 2,2 milliards d'euros.
Les profils des bénéficiaires sont légèrement différents, la CMU-C bénéficiant avant tout à des personnes jeunes et à des familles avec enfants, alors que l'ACS concerne toutes les classes d'âge tout en ciblant plus particulièrement les couples et les familles nombreuses. Les niveaux de revenus diffèrent également, puisque l'ACS s'adresse aux personnes disposant de revenus modestes, mais supérieurs au plafond d'accès à la CMU-C. Cette dernière vise ainsi principalement les 10% de ménages les plus modestes et l'ACS les 20% de ménages les plus modestes.
L'étude de la Drees montre aussi que si les barèmes de la CMU-C permettent bien de cibler les foyers à bas revenus, ils sont cependant moins avantageux pour les familles nombreuses. Cette situation tient au fait que celles-ci bénéficient de davantage de prestations sociales, qui relèvent leur niveau de revenus. Autre caractéristique : les familles et les personnes âgées sont celles qui perdent le plus à la sortie des deux dispositifs. Par exemple, au point de sortie de la CMU-C, lorsque les ressources d'un célibataire de 50-59 ans augmentent d'un euro, la perte de revenu associée représente 3% de son revenu ajusté (soit 380 euros annuels) s'il recourt à l'ACS et 6% (soit 730 euros annuels) dans le cas contraire.
Un fort effet redistributif, malgré le recours insuffisant
Il reste néanmoins que la CMU-C et l'ACS "réduisent les inégalités de manière significative". Si l'on convertit ces deux aides en équivalents monétaires pour évaluer leur impact redistributif, la CMU-C et l'ACS augmentent ainsi de 9% le pouvoir d'achat de leurs bénéficiaires les moins aisés (appartenant au premier décile). Cette hausse de niveau de vie est de 4,1% pour les personnes appartenant au deuxième décile. En moyenne, la CMU-C représente un gain de 440 euros par an et par bénéficiaire. Le montant du chèque pour l'ACS atteint pour sa part, en moyenne, 290 euros par an et par bénéficiaire.
Ce soutien au revenu des ménages les moins aisés contribue à la réduction des inégalités. Ainsi, en 2014, après redistribution, le rapport du niveau de vie moyen des 10% les plus riches par rapport aux 10% les plus pauvres est de 5,9. Si la CMU-C et l'ACS étaient monétisées et prises en compte dans le revenu disponible, le rapport de ces niveaux de vie s'établirait alors à 5,6, soit une baisse des inégalités de niveau de vie de 5%. L'étude observe au passage que cette réduction des inégalités de 5% est très proche de celle obtenue par les allocations familiales (7%), alors que ces dernières représentent un coût total de 12 milliards d'euros, soit 5,5 fois plus que la CMU-C et l'ACS réunies. Mais il est vrai que les allocations familiales ne sont pas ciblées sur les foyers les plus modestes.
L'étude pointe cependant la faiblesse récurrente de ces deux prestations : le taux de recours insuffisant. La Drees calcule que si la CMU-C et l'ACS connaissaient une situation de plein recours, leur impact redistributif serait accentué : 89% des personnes du premier décile bénéficieraient de l'un ou l'autre de ces dispositifs et le rapport du niveau de vie moyen des 10% les plus riches sur les 10% les moins aisés s'établirait alors à 5,4, soit une baisse supplémentaire de 4% des inégalités de niveau de vie.
source : localtis
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