Le débat ouvert par le gouvernement aiguise les appétits et suscite les craintes des acteurs du secteur.
Cinq mois pour convaincre
Les acteurs dits de la dépendance ont entamé la dernière ligne droite d’un débat ouvert par le gouvernement depuis deux ans en réalité. Avec deux rapports du Sénat (un en 2008, un autre fin janvier) et un autre de l’Assemblée nationale en 2010, tous les éléments de cette réforme de la fin du quinquennat sont sur la table.
Roselyne Bachelot a pourtant mis en place en janvier un comité interministériel chargé de préparer le débat national sur la dépendance des personnes âgées et installé quatre groupes de travail qui rendront leurs conclusions début juillet.
Parallèlement à partir du mois d’avril, les préfets et les directeurs des agences régionales de santé organiseront des débats interdépartementaux.
L’occasion pour les assureurs, mutuelles, maisons de retraite, hôpitaux, collectivités locales et partenaires sociaux de faire valoir leurs vues.
Ils pourront le faire aussi dans le cadre institutionnel du Conseil économique, social et environnemental (CESE), puisque le Premier ministre, François Fillon, a confié au président du CESE, Jean-Paul Delevoye, le soin de rédiger un rapport sur la dépendance, d’ici juin.
L’objectif du gouvernement est d’arrêter les premières mesures à l’automne, lors de l’examen par le Parlement du projet de loi de financement de la Sécurité sociale et de renvoyer le reste de la réforme au débat électoral de 2012. D’ici là, les différents acteurs espèrent orienter le débat en leur faveur.
Les assurances privées et les mutuelles
La Fédération française des sociétés d’assurance (FFSA) et la Mutualité française plaident en faveur d’un partenariat public-privé (PPP).
Très active à l’automne dernier, la FFSA se montre discrète depuis l’ouverture officielle du débat par le gouvernement en janvier. La fédération se prononce pour un système de couverture universelle avec le recours au public pour les plus démunis et au privé pour ceux qui ont les moyens.
Lors d’un débat organisé par la FFSA en décembre 2009, son président Bernard Spitz avait affirmé qu’une réforme “unissant assureurs et puissance publique ménagerait les finances publiques”. Le ministre du Travail de l’époque, Xavier Darcos, invité à ce débat, s’était inscrit dans la logique du partenariat public-privé, tout en insistant sur la “labellisation des contrats” d’assurance.
Favorables au PPP, les mutuelles mettent en garde contre un vrai-faux partenariat, comme pour la couverture maladie qui voit les complémentaires santé considérées par l’État comme une simple variable d’ajustement financière.
Les départements
Au nom des conseils généraux qui financent l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), l’Assemblée des départements de France (ADF) compte peser dans le débat, en organisant le sien.
Trois ateliers, programmés d’ici le printemps, déboucheront sur des propositions concrètes en mai.
Les présidents de conseil général réclament unanimement des mesures pérennes pour financer la dépendance, mais ils divergent sur les moyens à mettre en œuvre. L’enjeu financier est important puisque, selon l’ADF, les charges sociales obligatoires des départements, dont l’APA, devaient s’élever en 2010 à 13,68 milliards d’euros, l’État ne compensant que 7,64 milliards.
Les associations de handicapés
L’annonce début janvier par Roselyne Bachelot que la réforme à venir ne concernerait que les personnes âgées a mis le feu aux poudres.
La Fnath, l’Unapei et l’Association des paralysés de France (APF) ont déploré l’approche restrictive du gouvernement.
Début octobre, l’APF avait indiqué avoir reçu l’assurance de la part de l’Élysée que les personnes handicapées seraient également concernées par la réforme. Les acteurs du handicap, en premier lieu les associations, vont toutefois participer aux travaux initiés par la ministre. Des divergences pourraient apparaître, notamment sur le financement et les priorités.
La Fnath plaide pour un financement “par la solidarité nationale” quitte à augmenter la CSG.
L’Unapei insiste plutôt sur le développement des structures et services pour personnes handicapées vieillissantes et le maintien de l’aide sociale aux personnes handicapées.
La Fédération hospitalière de France
Présidée par le député UMP Jean Leonetti, la FHF défend le secteur public et rappelle qu’elle représente la majorité de l’offre d’hébergement des personnes âgées dépendantes (EHPAD).
À ce titre, elle met régulièrement en garde contre la privatisation du secteur des maisons de retraite en France, déplorant qu’entre 2003 et 2007, 61 % des places pour personnes dépendantes aient été créées par des promoteurs privés.
La fédération a investi ce débat depuis plusieurs mois et réclamé notamment que la perte d’autonomie soit compensée par un droit universel, quel que soit l’âge de celui qui la subit ou l’origine de celle-ci.
Prudent, Jean Leonetti estime que le recours au secteur assurantiel privé ne doit se faire que de manière optionnelle et que le socle financier de la couverture doit reposer sur la solidarité nationale.
A lire dans son contexte et son intégralité (acteurspublics.com/ bruno botella)
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