Le Conseil constitutionnel, saisi le 29 février d'une question prioritaire de constitutionnalité sur l'article 222-33 du code pénal qui définit le délit de harcèlement sexuel, a décidé vendredi 4 mai d'abroger cet article, le jugeant contraire à la Constitution (lire le communiqué). Cela a provoqué de nombreuses réactions.
Le délit de harcèlement sexuel a été introduit dans le code pénal en 1992 et défini alors comme le fait de harceler autrui en usant d'ordres, de menaces ou de contraintes dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle par une personne abusant de l'autorité que lui confèrent ses fonctions.
La loi avait modernisé en 2002 cette définition en élargissant le champ de l'incrimination par la suppression de toutes les précisions relatives aux actes par lesquels le harcèlement peut être constitué, ainsi qu'à la circonstance relative à l'abus d'autorité.
Dans sa version soumise au Conseil, le fait de harceler autrui est punissable d'un an d'emprisonnement et de 15.000 euros d'amende.
Selon le Conseil, "l'article permet que le délit de harcèlement sexuel soit punissable sans que les éléments constitutifs de l'infraction soient suffisamment définis. Ces dispositions méconnaissaient le principe de légalité des délits et des peines. Le Conseil constitutionnel a estimé qu'en punissant "le fait de harceler autrui dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle" sans définir précisément les éléments constitutifs de ce délit étaient contraire à la loi. La mesure ignoraient les principes de clarté et de précision de la loi, de prévisibilité juridique et de sécurité juridique".
Le conseil constitutionnel a donc déclaré contraire à la constitution et abrogé de l'article 222-33 du code pénal prend effet à compter de la publication de la décision", soit le 4 mai 2012.
Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale, note dans un communiqué que la décision prise vendredi "conduit à un vide juridique". En tant que ministre en charge des droits des femmes, elle invite "la nouvelle Assemblée nationale qui sortira des urnes au mois de juin prochain à se saisir en urgence de ce dossier afin de garantir les droits des salariés et, plus particulièrement, ceux des femmes".
Marie-Arlette Carlotti, responsable du pôle égalité femmes-hommes au Parti socialiste, Najat Vallaud-Belkacem, porte-parole de François Hollande, et Caroline de Haas, initiatrice de la campagne "Le droit des femmes passe par la gauche", affirment que la décision du Conseil constitutionnel "est la responsabilité directe de la droite", et que cela "fait peser de lourdes incertitudes sur les procédures judiciaires en cours d'instruction".
"François Hollande s'engage, s’est engagé à ce qu'une nouvelle loi sur le harcèlement sexuel soit rédigée et inscrite le plus rapidement possible à l'agenda parlementaire. Cette loi devra s'appuyer sur la définition du harcèlement sexuel telle qu'elle existe dans le droit communautaire, comme le demandent les associations féministes depuis de nombreuses années", ajoutent-elles dans un communiqué.
"Le Conseil constitutionnel sait qu'une nouvelle loi ne pourra pas être votée dans les semaines qui viennent. Les femmes vont donc rester des mois sans protection. C'est irresponsable et un signe de mépris envers les femmes victimes de harcèlement. Une nouvelle loi devra donc être votée en urgence dès l'été. Les députés du Front de Gauche s'y engagent", affirme le Parti de gauche dans un communiqué.
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