Le Conseil interprofessionnel des vins de Bordeaux (CIVB) avait alerté le gouvernement sur la requête introduite par l’association Wine of America qui pourrait permettre à une entreprise de vinification, qui n’est pas exploitante viticole, de s’approvisionner en raisins auprès de viticulteurs, du moment qu’elle contractualise avec eux depuis plusieurs années.
Cela constituerait un risque de « tromperie pour le consommateur » que constituerait selon lui l'autorisation par la Commission européenne d'exporter des Etats-Unis des vins portant la mention 'château' ou 'clos'.
« Cela légitimerait un véritable détournement de notoriété » et « une distorsion de concurrence puisque la définition américaine du terme château est extrêmement laxiste », a ajouté M Haussalter le président du CIVB qui demande au ministère de l'Agriculture de « monter au créneau ».
Selon Laurent Gapenne, président de la Fédération des grands vins de Bordeaux, « la définition américaine comprend des raisins issus de tout le territoire et jusqu'à 25% provenant de l'étranger », alors que pour la législation européenne actuelle « c'est l'ensemble des raisins qui doivent être issus de la propriété ».
« Ce serait un mauvais arbitrage de troquer cette réglementation contre autre-chose », a-t-il ajouté sans préciser quelle serait cette contre-partie, mais garantissant « la mobilisation de tous les producteurs européens de vin contre cette mesure ».
Le ministre français de l'Agriculture, Stéphane Le Foll, refuse lui également de céder le droit aux viticulteurs américains d'exporter vers l'Europe des vins portant la mention « château ».
La France a réussi à obtenir le report du vote de la décision permettant à certains vins ne respectant pas les règles attachées à l’octroi de la mention traditionnelle château de l’utiliser.
Cette petite victoire pour la France pourrait être de courte durée. Paris est isolé sur le dossier et Stéphane Le Foll a expliqué lundi avoir du mal à convaincre ses partenaires européens de le suivre. Les autres pays voient dans cet accord la possibilité d'ouvrir d'autres marchés.
« La Commission veut lâcher sur l'appellation château, ce à quoi la France est opposée », a souligné le Ministre en marge d'une réunion avec ses homologues européens à Bruxelles. « On est dans une discussion difficile », a-t-il concédé.
La France est particulièrement attachée à l’appellation « Château » qui est une spécificité française très forte.
Certains producteurs étrangers peuvent d’ores et déjà utiliser la mention château en tant que mention traditionnelle, mais cette utilisation est conforme à la définition française : un château est défini comme un terme associé au nom de l’exploitation à condition que le raisin provienne exclusivement de celle-ci et que la vinification soit effectuée par cette exploitation.
La France tient à ce que la définition traditionnelle s’applique de façon équivalente aux vins de toutes origines dans le respect de la réglementation actuellement applicable en Europe et cela, afin, en particulier, de respecter les indications géographiques et de protéger la notion de terroirs tellement liée à cette mention « château » qui lui est chère.
Début septembre, les vignerons avaient obtenu le droit d'indiquer le millésime et le cépage sur les vins de table exportés aux Etats-Unis, ce qui profite aux grands négociants français et européens.
Selon la Commission, ce précédent accord a été bénéfique à tous. La demande américaine actuellement examinée a été déposée en 2010 et Bruxelles assure qu'avant ces dernières semaines, Paris ne s'était jamais opposé au texte.
Pour Dacian Ciolos cette décision est "technique" et non politique. Aucun nouveau calendrier n'a été défini, mais la décision finale pourrait intervenir dans les semaines à venir.
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