Dans l'ensemble, le patronat est contre. Mais les dirigeants du Medef sont plus circonspects car les syndicats en ont fait un point incontournable de la négociation sur "la sécurisation du marché de l'emploi", en l'absence duquel ils ne signeront pas.
La mesure constitue une des promesses de François Hollande donnée par le ministre du Travail, Michel Sapin aux partenaires sociaux. Le principe est d’augmenter le montant de la cotisation versée par les entreprises à l'assurance chômage pour les personnes en CDD. Ce pourcentage serait d'autant plus grand que le contrat est court, afin d'inciter les entreprises à signer plus de CDI, ou des CDD plus long.
La majorité des organisations syndicales souhaite la mise en place de celle-ci afin d’enrayer la hausse des emplois précaires. Le patronat y voit lui, une augmentation du coût du travail qui ne conduirait pas à la création d’emploi. Louis Gallois, l'ex-patron de la SNCF et d'EADS auteur du rapport sur la compétitivité des entreprises françaises, estime quant à lui que l’on "peut imaginer d'introduire des souplesses dans le CDI et, en même temps, de sécuriser les personnes en CDD". Il demande la fin "de ce marché du travail à deux vitesses".
"Le marché du travail est scindé en deux. Il y a chaque année 3 millions d'embauches en CDI mais 18 millions en CDD, dont 14 millions à moins d'un mois. Des salariés cumulent 5, 10, 15 CDD dans l'année! Il faut en finir avec ce marché à deux vitesses", affirme Louis Gallois, dans un entretien au Parisien/Aujourd'hui en France.
Il déplore qu'en France "les actifs ne représentent que 51 % de la population contre 56 % en moyenne en Europe" et prône "une augmentation" du "taux d'emploi des jeunes et des seniors".
Les contrats courts ont augmenté ces dix dernières années avec la hausse du chômage. Ils sont devenus une variable d’ajustement pour les entreprises en recherche de flexibilité, mais aussi une forme de période d’essai.
Michel Husson, de l’Institut de recherches économiques et sociales (Ires) note que l’accès à un CDI se fait plus tard qu’avant et la volonté du patronat de grignoter le CDI.»
En dix ans, de 2000 à 2010, les CDD de moins d’un mois ont ainsi quasiment doublé, passant de 6,6 millions à 12,4 millions.
Le problème de ce type de contrat de travail, successif et aléatoire est notamment qu’il pénalise leurs détenteurs dans l’accès au logement.
Côté patronat, beaucoup admettent cependant que certaines entreprises abusent du contrat court. Dernier exemple médiatique en date, en novembre, l'ex-PDG de TF1 Patrick Le Lay a été condamné pour le cas de cinq salariés ayant cumulé de 5 à 19 ans d'ancienneté, dont "l'emploi exercé était lié à une activité normale et permanente de l'entreprise", selon l'avocate du syndicat ayant déposé plainte. Au comité exécutif du Medef, on rappelle toutefois que la fonction publique est aussi un grand utilisateur de contrats précaires. Une spécialiste du cancer de l'Inserm n'a-t-elle pas récemment saisit la justice à l'issue de son douzième CDD depuis 2011 ?
Le patronat n'est pas homogène. Les fédérations représentant la restauration et l'hôtellerie, par exemple, sont directement concernées par l'utilisation massive de contrats précaires. Il est donc peu probable que ces entreprises soient prêtes à faire les mêmes concessions que l'industrie.
Ensuite, les fédérations ne demandent pas non plus les mêmes contreparties. Celles qui comptent beaucoup de petites entreprises ne sont pas tellement intéressées par davantage de flexibilité dans les procédures de licenciements collectifs, auxquelles elles font peu appel, mais plaident en revanche pour une réduction des recours judiciaires sur les autres types de licenciements.
Enfin, d'autres sujets interfèrent, comme l'extension des complémentaires santé : certaines branches sont pour, d'autres ont déjà des systèmes efficaces, résultats de plusieurs années de travail, tandis que d'autres encore s'inquiètent de leur coût, environ 1% de la masse salariale.
En Europe, la législation a évolué. L’Italie a signé un accord, le 21 novembre, sur 1,4 point de majoration des cotisations sociales patronales d’assurance chômage sur les contrats courts. La France fera t-elle de même ?
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