Après l'Assemblée nationale, le Sénat, jeudi 27 février, a adopté les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale.
La mesure clé du projet de loi est la création du compte personnel de formation, le CPF, appelé à se substituer au droit individuel de formation, le DIF, à compter du 1er janvier 2015. La grande différence est qu'il permettra d'attacher des droits à la formation directement à la personne et non au contrat de travail. Il suivra ainsi la personne tout au long de sa carrière, de l'âge de 16 ans à la retraite. Le CPF sera crédité en heures jusqu'à un plafond de 150 heures obtenu en un maximum de sept ans (et non plus neuf, comme initialement prévu). Les heures accumulées ne seront donc pas perdues en cas de changement d'employeur. Au-delà du plafond, le compte pourra faire l'objet d'abondements complémentaires de la part de l'employeur, du salarié, de Pôle emploi, des régions, de l'Etat, les organismes collecteurs agréés ou encore l'Agefiph pour les personnes handicapées.
Le CPF permettra d'accéder à des formations liées aux "besoins de l'économie" mais ne sera dans un premier temps applicable qu'aux salariés du privé et aux chômeurs, et non aux fonctionnaires.
Outre le CPF, le texte s'attaque au financement de la formation telle qu'elle a été négociée dans le cadre de l'ANI du 14 décembre 2013. Une contribution unique (au lieu de trois aujourd'hui) est instaurée pour l'ensemble des entreprises, qui sera versée par les entreprises à leur Opca : cette contribution va de à 0,55% de la masse salariale pour les entreprises de moins de 10 salariés à 1% pour celles de plus de 10 salariés. C'est justement l'un des points de crispation de la CGPME. "Les perdants seront les PME assujetties à de nouvelles obligations sans avoir les moyens financiers de les mettre en œuvre", s'était-elle insurgée il y a deux mois. "Ce texte consacre une rupture d'égalité devant l'accès à la formation professionnelle, selon que l'on travaille ou non dans un grand groupe", maintient-elle, dans son communiqué.
Toutefois, les parlementaires ont prévu un renforcement de la mutualisation des financements au profit des entreprises de 10 à 49 salariés : chaque année, les fonds non utilisés par les Opca au titre du CPF seront reversés au FPSPP (fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels).
Les contrats d'apprentissage pourront désormais être conclus dans le cadre d'un CDI. Les jeunes atteignant 15 ans avant le terme de l'année civile pourront débuter leur formation sous statut scolaire ou de stagiaire avant de conclure leur contrat. Les missions des centres de formation des apprentis sont par ailleurs renforcées. Ils travailleront notamment avec les missions locales pour apporter un accompagnement aux apprentis afin de "prévenir ou résoudre les difficultés d'ordre social et matériel susceptibles de mettre en péril le déroulement du contrat d'apprentissage".
Le texte approfondit la réforme de la taxe d'apprentissage initiée par la loi de finances pour 2013, en partie censurée par le Conseil constitutionnel. La nouvelle taxe (0,68% de la masse salariale) est issue de la fusion de la taxe actuelle (0,5%) et de la contribution au développement de l'apprentissage (0,18%). Les entreprises ne pourront pas affecter plus de 21% de la nouvelle taxe d'apprentissage due aux CFA et aux sections d'apprentissage et pas plus de 23% aux autres formations premières (lycées, universités, grandes écoles…).
Mais la fraction de la taxe versée aux régions et les modalités de répartition entre elles seront définies dans la loi de finances pour 2015. Un point très important pour les régions qui attendent de connaître les ressources dont elles vont disposer pour pouvoir atteindre les objectifs gouvernementaux, alors que l'apprentissage a connu une baisse conséquente en 2013.
Sans attendre la deuxième loi de décentralisation, le texte consacre la compétence pleine et entière des régions dans le domaine de la formation, c'est-à-dire pour tous les publics, alors que jusqu'ici elles étaient responsables des demandeurs d'emploi. Le projet de loi précise notamment "les conditions dans lesquelles la région organise et finance le SPRFP (service public régional de la formation professionnelle), afin de garantir l'accès à la qualification". Il précise ses missions dans ce domaine (lutte contre l'illettrisme, égal accès des femmes et des hommes aux filières de formation, formation des personnes handicapées, des personnes sous main de justice, des Français établis hors de France...).
Les régions "coordonneront" l'achat public de formation public de formations pour leur compte et, pour les formations collectives, pour le compte de Pôle emploi. Ainsi, l'achat de formations collectives par Pôle emploi ne sera possible que dans le cadre d'une convention conclue avec la région.
Le projet de loi pose par ailleurs "les bases de la reconnaissance d'un Sieg (service d'intérêt économique général) pour la formation des publics en difficulté. Un article pose le principe et les modalités de la "compensation financière" de l'Etat aux régions pour "les transferts de compétences à titre définitif".
Le texte instaure par ailleurs un contrat de plan régional de développement des formations et de l'orientation professionnelle. Les parlementaires ont enfin clarifié les conditions dans lesquelles l'Etat pourra transférer aux régions les immeubles de l'Afpa.
Devant les sénateurs, jeudi 27 février, Michel Sapin s'est engagé "à ce que toutes les mesures s'appliquent dès le 1er janvier 2015, en particulier celles sur la formation professionnelle". "Evidemment, ce n'est pas cela seul qui inversera la courbe du chômage mais notre souci est d'agir en profondeur", a-t-il déclaré.
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