Et le scénario d’un dépassement pouvant aller jusqu’à + 6°C
Le cinquième rapport du GIEC indique que nous nous situons actuellement sur une trajectoire qui ne sera pas compatible avec l’objectif des 2°C. Les concentrations de gaz à effet de serre actuelles se situent à un niveau sans précédent depuis au moins 800 000 ans. Si les actions nécessaires ne sont pas entreprises, les scénarios les plus pessimistes prévoient en effet une hausse des températures comprise entre 5 et 6°C d’ici la fin du siècle, ce qui correspondrait à une hausse du niveau de la mer entre 59 et 82 cm.
Depuis quatre ans, le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) publie un rapport sur l’écart entre les engagements pris par les pays pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre et ce qu’il faudrait faire d’ici à 2020 et 2030 afin de ne pas dépasser une augmentation de +2°C au cours du XXIème siècle. Les perspectives décrites dans ce rapport montrent qu’il est encore techniquement possible de ne pas dépasser l’objectif des 2°C à travers l’adoption immédiate de mesures ambitieuses.
Afin de faire face aux conséquences de telles émissions, la question de l’adaptation est centrale et se pose d’ores et déjà. La vulnérabilité aux catastrophes climatiques est ressentie par tous les États, sans épargner les plus puissants (ouragan Sandy en 2012 aux États-Unis). Face à ces phénomènes extrêmes rendus plus fréquents et plus intenses du fait de l’augmentation de la température moyenne, le cadre d’action de Hyogo, adopté par les Nations unies en 2005, vise à accroître la résilience face aux catastrophes dans l’ensemble du cycle de gestion (prévention, préparation, réponse et redressement rapide). La troisième conférence mondiale sur la réduction des risques de catastrophes qui se tiendra à Sendai (Japon) en mars 2015 permettra d’adopter un cadre ambitieux pour l’après-2015, afin de relever plus efficacement les défis à venir.
Par ailleurs, nombreux sont les pays qui prennent peu à peu conscience que la crise climatique va se révéler être un « multiplicateur de menaces », du fait notamment de la raréfaction des ressources naturelles, dont l’eau, et de la désertification croissante qu’elle va entraîner. Les enjeux sécuritaires du dérèglement climatique font par conséquent partie du travail du G7 mais aussi de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) : le Forum de Prague en septembre 2014 portait sur les risques de catastrophes, induits notamment par le dérèglement climatique, et leur impact sur la sécurité.
Les émissions de gaz à effet de serre, reflets de la mondialisation et de ses évolutions
La mondialisation a entraîné une explosion de la production, de l’échange et de la consommation de biens matériels. Dans le même temps, la croissance démographique et l’émergence des classes moyennes ont accru l’empreinte écologique de l’humanité. Ces évolutions expliquent l’accélération du rythme de croissance des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
49 milliards de tonnes équivalent CO2 (GtCO2eq) ont été émises en 2010, ce qui correspond à une croissance moyenne de 2,2% par an sur la période 2000-2010 et de 32% depuis 1990. Les émissions cumulées depuis le début de l’ère industrielle ont doublé depuis 1970, atteignant 2 000 GtCO2eq. En 2010, la production d'énergie représentait 35% des gaz à effet de serre, l'agriculture et la forêt 24%, l'industrie 21%, le transport 14% et le bâtiment 6%. Le CO2 est prédominant parmi ces gaz : il représente 76 % des émissions en 2010.
La répartition de ces émissions a elle aussi évolué : pendant longtemps elles provenaient des pays développés, mais les émissions des pays émergents et en développement les ont désormais dépassé. La Chine est ainsi devenue le premier émetteur mondial, avec presque 25% des émissions mondiales, suivie par les États-Unis (un peu moins de 15%), l’Union européenne (environ 10%), l’Inde et la Russie (avec approximativement 5% chacune).
Dans l’ensemble, les émissions par tête restent toutefois largement supérieures dans les pays développés. Des pays comme l’Australie, les États-Unis et le Canada ont une moyenne d’environ 23 tonnes CO2eq par personne et par an en 2010. À titre de comparaison, en 2010, les émissions par habitant de l'UE sont d'environ 10 tonnes, celles de la France se situant autour de 8 tonnes. On notera toutefois que plusieurs émergents sont quasiment à des niveaux européens, avec plus de 10 tonnes pour l'Afrique du Sud et le Brésil (notamment en raison des émissions induites par la déforestation tropicale) et avec la Chine dont les émissions par habitant sont aujourd'hui voisines de celles de la France. L'Inde fait figure d'exception avec des niveaux très faibles à 1,9 tonne par habitant et par an. Le Mexique et l'Indonésie sont à des niveaux intermédiaires avec respectivement 6 et 5 tonnes.
Depuis l’adoption de la Convention sur le climat en 1992 et du protocole de Kyoto en 1997, les responsabilités et les capacités des États ont évolué. Afin que le régime climatique reflète ce nouveau contexte international, la conférence sur le climat de Durban en 2011 a fixé un mandat clair aux 196 parties à la CCNUCC : parvenir en 2015 à l’adoption d’un nouvel accord sur le climat applicable à tous les pays afin qu’il entre en vigueur en 2020.
Il semble acquis que ce nouvel accord prendra la forme d’un « paquet », d’une « alliance de Paris pour le climat », comprenant l’accord en lui-même, des décisions associées de mise en oeuvre qui seront adoptées par la COP ainsi que ce qui pourrait figurer dans un programme de travail pour la période 2015-2020. Des avancées en matière de financements et de transferts de technologies seront également attendues à Paris. Enfin, les initiatives sectorielles des différents acteurs de l’agenda des solutions devront faire partie de cette alliance.
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