Synthèse de l'audition du Général Philippe Loiacono, commandant du SMA (Service Militaire Adapté). (17 février 2015)
Cette audition s’inscrit dans un cycle d’auditions de la Commission de la Défense consacré aux différents dispositifs citoyens et faisant suite à l’annonce par le Président de la République d’expérimenter en métropole 3 centres du SMA (Service Militaire Adapté).
Créé en 1961, le SMA est un dispositif militaire d’insertion professionnelle destiné aux jeunes volontaires ultramarins en situation de décrochage âgés de 18 à 25 ans. Il est placé sous la tutelle unique du ministère des Outre-mer et s’articule autour d’un état-major implanté au sein de ce dernier, ainsi que de 7 régiments basés dans les principaux départements et territoires d’outre-mer. Ses missions couvrent 3 champs principaux : faciliter l’insertion dans la vie active de ces jeunes vivants à l’outre-mer ; participer, en appui des autres services de l’Etat, à l’activation et l’exécution des plans civils d’urgence et de secours (exemple de la lutte du régiment de la Réunion contre le chikungunya en 2006) ; et enfin la mise en valeur des DOM et TOM grâce à des chantiers pratiques externes.
Le SMA s’adresse à 3 types de public en situation de décrochage. Pour les diplômés aptes à exercer un premier emploi, le SMA offre en son sein une première expérience professionnelle via un contrat d’adaptation d’un an (renouvelable 4 fois). Pour les diplômés en difficulté, un accompagnement de 6 mois est proposé afin de développer leurs compétences sociales et d’améliorer leurs capacités professionnelles en vue de faciliter leur insertion professionnelle. Enfin, les non-diplômés sont accompagnés tout au long d’une formation socio-éducative et professionnelle d’une durée moyenne de 10 mois visant à la reprise d’une formation, une meilleure employabilité, voire une inclusion dans l’emploi. Le dispositif favorise l’acquisition de compétences professionnelles réparties dans un panel de plus de 50 métiers allant du secteur du BTP, du transport, au tourisme en passant par les énergies renouvelables.
Le SMA s’articule autour de 3 principes : la militarité (vivre en communauté permet une première intégration), la globalité (acquisition du savoir, du savoir-faire mais aussi du savoir-être et du savoir-donner), et l’employabilité, l’objectif unique du dispositif.
Le SMA comprend une formation dont le tronc commun correspond à la formation militaire initiale visant à la remise à niveau dans les savoirs de base, qui est sanctionnée par l’obtention du certificat de formation générale (CFG) obtenu par près de 90 % des volontaires. La prise en charge de l’illettrisme se fait dans le cadre du SMAlpha. Le dispositif comprend également une formation éducative au savoir-être, sanctionnée par une attestation de formation citoyenne (AFC), ainsi qu’une autre relative à la prévention et aux premiers secours. En ce qui concerne l’acquisition de compétences professionnelles, le volontaire peut obtenir une attestation de formation professionnelle (AFP) certifiant qu’il ou elle a suivi plus de 1000 heures de formation comprenant 2 à 3 périodes d’application en entreprise. La formation globale dispensée lors du SMA est sanctionnée par l’attribution du certificat d’aptitude personnelle à l’insertion (CAPI). Cela est complété par la préparation et le passage du permis de conduire, obtenu par près de 80% des volontaires. De plus, chaque jeune touche une pension de 340 € par mois.
Effectifs et résultats chiffrés
En 2014, le SMA a recruté 66% de non-diplômés et 44% de jeunes hommes et femmes illettrés de degré 1 et 2 sur un total de 5 670 volontaires (objectif de 6 000 d’ici 2017). Il y a environ 1 000 encadrants - dont 650 officiers et sous-officiers d’active et 350 formateurs – ce qui donne un ratio de 1 cadre pour 4,5 à 5 volontaires. 27% des volontaires sont des jeunes femmes.
Les résultats sont impressionnants puisque 77% des volontaires ont été insérés : 48% ont trouvé un emploi stable, 25 % un emploi de transition, 27% une formation professionnelle. Moins de 3% s’engagent ensuite dans l’armée.
Projet de transposition au niveau national
Pour le commandant du SMA, la question de la transposition ne se pose pas car une première expérience a déjà été effectuée en 2005 avec la création de l’EPIDE (cf. audition de Mme Nathalie Hanet). De plus, il préconise d’attendre les résultats de la transposition du dispositif en métropole dans 3 centres, avant de tirer des conclusions. Questionné sur la possibilité d’un service civique obligatoire, il ne voit pas de risque de concurrence entre ce dispositif et le SMA en outre-mer.
Interrogé par Mme Marianne Dubois sur la question d’une gouvernance unique du dispositif en cas de transposition, le général Loiacono répond qu’il ne serait pas pertinent selon lui de le modifier puisqu’en ne dépendant pas du ministère de la Défense mais de celui de l’Outre-mer, le SMA peut bénéficier de crédits ouverts et d’aides d’autres acteurs comme le Fonds Social Européen (FSE) et le Fonds Européen de Développement Régional (FEDER).
Financement
Le budget du SMA est de 200 millions € par an soit un ratio de 28 000€ par volontaire. Avec un rebasage sur la métropole, le ratio passerait à 20 000€ puisque la masse salariale ne serait plus indexée sur le taux appliqué en outre-mer. Le dispositif bénéfice également de plus de 15 à 20 millions € de dotations du FEDER et FSE, ainsi que d’aides des régions et collectivités.
Rapports avec les collectivités, les entreprises et autres institutions
Suite à la question de M. le député Yves Fromion, relative aux liens entre le SMA et les régions, le général Loiacono rappelle qu’un document cadre fixant un programme opérationnel est élaboré en partenariat avec ces collectivités tous les 7 ans (le dernier : 2014-2020), et que le dispositif bénéficie de subventions des régions (par exemple 1 million € pour la Martinique) et des chambres consulaires.
Interrogé sur la mise en adéquation de l’offre et de la demande d’emploi, le commandant du SMA met en avant le rôle du Conseil de Perfectionnement crée en 1991 et réunissant chaque année sous l’égide du préfet et du président de région, tous les responsables de l’emploi, de l’orientation et de la formation. Cet organe trace pour 2 ans les principales orientations du SMA relatives aux secteurs dynamiques de l’emploi sur lesquels le dispositif doit se focaliser. Le général précise également que les entreprises qui embauchent des volontaires après leur SMA, ne bénéficient pas d’aides spécifiques mais cela se fait dans le cadre déjà existant des contrats aidés ou des contrats d’avenir.
Le dispositif fonctionne également en partenariat avec les acteurs de l’emploi et de la formation que sont, en plus des régions, Pôle emploi, les organisations professionnelles et bien sûr les entreprises, particulièrement les TPE, PME et PMI. Le label SMA est un vrai gage de confiance pour les professionnels d’outre-mer, mais aussi de métropole puisque 20% des volontaires s’y insèrent.
Rédaction : Guillaume MURE, étudiant à Sciences-Po, stagiaire auprès de Guy Chambefort à l'Assemblée nationale.
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