Le Conseil constitutionnel a validé le 29 mai l'interdiction faite à tout distributeur de couper l'alimentation en eau dans une résidence principale même en cas d'impayé et cela tout au long de l'année. Cette disposition a été introduite dans le droit français par la loi Brottes du 15 avril 2013, complétée par son décret d'application du 27 février 2014. C'est la même loi qui a institué aussi le principe de trêve hivernale pour l'électricité et le gaz, au bénéfice de tous les consommateurs sans distinction de revenus.
Dans sa décision, le Conseil a d'abord relevé qu'en prévoyant l'interdiction, quelle que soit la situation des personnes et pendant l'année entière, le législateur a entendu s'assurer qu'aucune personne en situation de précarité ne puisse être privée d'eau. Il a ensuite rappelé, en s'appuyant sur les règles fixées par le Code général des collectivités territoriales, l'encadrement législatif spécifique qui entoure les contrats passés pour la distribution d'eau et en a déduit que les distributeurs d'eau exercent leur activité sur un marché réglementé.
Dans sa décision, il a donc "jugé que l'atteinte à la liberté contractuelle et à la liberté d'entreprendre qui résulte de l'interdiction d'interrompre la distribution d'eau n'est pas manifestement disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi par le législateur". Il "a écarté les griefs" du distributeur d'eau, qui avait dénoncé "une atteinte excessive à la liberté contractuelle et à la liberté d'entreprendre". Il a par conséquent déclaré conforme à la Constitution la dernière phrase du troisième alinéa de l'article L. 115-3 du code de l'action sociale et des familles.
"C'est une belle victoire pour les défenseurs de la dignité des plus démunis. C'est aussi la reconnaissance d'un besoin essentiel de tous qui l'emporte", s'est réjoui François Brottes dans un communiqué. Le président de la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, auteur de la loi de 2013, rappelle néanmoins que dans le projet de loi de transition énergétique en cours de discussion, les députés ont prévu que les distributeurs puissent dans certains cas réduire le débit, comme c'est le cas pour l'électricité, mais qu'à son initiative, ils ont tenu à rétablir l'interdiction généralisée du principe des coupures d'eau que les sénateurs avaient supprimée. Selon lui, "les distributeurs conservent tous les moyens légaux de recouvrer leurs créances puisque la dette des usagers n'est pas effacée". "Simplement, le dispositif légal est désormais équilibré : il permet d'apporter un accompagnement spécifique aux plus démunis, tout en neutralisant un éventuel 'effet d'aubaine' pour les autres", a-t-il estimé.
Source : Localtis
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