Après une première lecture au Sénat en novembre 2015, le projet de loi de modernisation de la Justice du XXIème siècle est arrivé ce mardi en discussion à l'Assemblée nationale. Ce texte entend renforcer l’indépendance de la justice et la rendre plus rapide, plus accessible et plus efficace. Ce texte vise 4 grands objectifs : une justice indépendante, rapide, accessible et efficace
Afin de rendre la justice du quotidien plus accessible, ce projet de loi consacre le service d’accueil unique du justiciable, crée un cadre légal commun aux actions de groupes en matière judiciaire et administrative, ainsi, notamment, qu’une action de groupe en matière de discrimination. L'indépendance des magistrats est renforcée et la prévention des conflits d'intérêt est organisée.
Afin d’améliorer l’efficacité et la rapidité du traitement des affaires les plus simples, dans lesquelles n’existe aucune contestation, le recours au juge est soit exclu- c’est le cas pour le divorce par consentement mutuel, sauf cas particuliers visant à protéger les plus faibles- soit prévu à titre seulement de recours au profit du paiement immédiat d’une amende c’est le cas pour les délits de conduite sans permis ou sans assurance, commis par des primo-délinquants et sans circonstance aggravante.
Le texte prévoit également la suppression des tribunaux correctionnels des mineurs, procédure complexe, inadaptée au traitement rapide des mineurs récidivistes, très peu utilisée (seulement 1 % des faits traités dans ce cadre), et qui constitue une atteinte au principe de spécialisation de cette justice.
Au-delà des moyens déjà alloués à la justice dans le cadre des deux plans de lutte contre le terrorisme et dont le budget a été régulièrement préservé, 107 M€ ont fait l’objet d’un dégel pour améliorer le fonctionnement des juridictions.
Interventions de Jean-Jacques URVOAS, Garde des sceaux, Ministre de la Justice
« Aujourd’hui pour l’écrasante majorité de nos concitoyens qui deviennent par contrainte parfois des justiciables - 4 millions de Français qui vont dans des palais de justice par an -, la justice est trop complexe et n’est pas simple, et elle n’est pas rapide, donc mon souci […] c’est de faire que la qualité du service soit à la hauteur des attentes » par une meilleure utilisation des moyens. Pour une justice plus protectrice et plus accessible, les 2 projets de loi de réforme (organique et ordinaire) agissent sur la justice du quotidien :
♦ consacre le service d’accueil unique du justiciable, en cours de déploiement dans plusieurs juridictions ;
♦ crée un cadre légal commun aux actions de groupes en matière judiciaire et administrative ainsi qu’une action de groupe en matière de discrimination – qui sera complétée dans le projet de loi égalité et citoyenneté par la qualification du racisme de « circonstance aggravante généralisée »
♦ réforme les juridictions sociales (transfert de certains contentieux au tribunal de grande instance) et recentre le tribunal d’instance sur la justice civile rendant ainsi plus lisible l’organisation judiciaire.
♦ Il est également prévu de renforcer l'indépendance des magistrats et mieux prévenir les conflits d'intérêt (entretien déontologique ainsi que, pour les plus hauts magistrats, une déclaration de patrimoine, modalités d’évaluation modernisées, liberté syndicale consacrée) ; …
Le projet de loi contient aussi des « mesures sur lesquelles […] on se dispense de l’appel au juge pour permettre au juge de se recentrer sur ce qui est son métier, le litige, le fait de trancher des difficultés par l’application de la règle de droit » :
♦ Le projet de loi prévoit que « les juges se concentrent sur les divorces où il y a du contentieux pour protéger ceux qui ont besoin d’être protégés » et éviter la lenteur du processus, car il existe 66 000 divorces par an par consentement mutuel et des temps de décision pouvant atteindre « presque 3 ans par exemple à Bobigny, presque 2 ans dans les juridictions comme Lyon ». Dans les divorces par consentement mutuel, « 99,9 % des conventions » sont aujourd'hui homologuées par le juge. « Dans le cas d’espèce, pour tous ceux qui sont d’accord, qui ont signé une convention, dont le divorce est équilibré, souvent il n’y a pas d’enfant, souvent il n’y a même pas de patrimoine », il s’agit de réduire les délais d’attentes parfois très longs. Dans la réforme proposée « chaque partie aura un avocat et ce sont les avocats qui seront garants de cet équilibre. Si l’enfant souhaite être entendu, alors la procédure de divorce ne sera pas changée, c’est le juge aux affaires familiales qui le prononcera ».
♦ Il en sera de même pour les femmes victimes de violence. « L'avocat a l'intérêt de la défense de son client et quand vous avez 2 avocats, vous avez l'équilibre ».
♦ S’agissant des délits routiers, le texte entend « sanctionner plus vite et plus fort », par contraventionnalisation et forfaitisation. Ainsi pour la conduite sans permis ou sans assurance – 30 000 cas par an – il est « proposé tout de suite une amende de 500 € » au lieu de 300 € au bout de 7 mois de procédure, « donc plus vite la sanction, plus forte dans la sévérité »
Le traitement de certaines démarches est par ailleurs simplifié : l’enregistrement des PACS et changements de prénoms est confié aux officiers de l’état civil, la procédure de surendettement est simplifiée. Le texte prévoit également la suppression les tribunaux correctionnels des mineurs, « parce que c’est complexe, parce que c’est inutile et parce que c’est fondamentalement hostile [...] à la primauté de l’éducatif ». « Les faits ont démenti leur pertinence puisque nous savons maintenant qu’il y a seulement 1 % de la délinquance des mineurs qui est traité par les tribunaux correctionnels pour mineurs ». La mise en place de ces tribunaux a « complexifié les procédures puisqu’il y a pas de juge spécialisé ». « On combat la délinquance des mineurs d’abord par l’éducatif et donc du coup considérer qu’un tribunal composé de juges non spécialisés allait prononcer des sanctions plus dures était une illusion que l’ancienne majorité a poursuivi ».
Enfin, le Premier ministre a permis de « dégeler […] 107 M€ pour les juridictions ». « Ça fera plus de dépenses utiles dans les juridictions qu’il y en avait eues l’année dernière. Ainsi, 41 M€ seront consacrés « aux frais de justice par exemple », pour les analyses génétiques, psychiatriques … avec l’objectif de réduire les délais de paiement de 4 à 2 mois ; 27 M€ seront dédiés au dépenses de fonctionnement afin d’accompagner le déploiement des services d’accueil unique du justiciable, 21 M€ pour l’information et 18 M€ pour l’immobilier.
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