"Comme Jacques Chirac en son temps, Nicolas Sarkozy a donc fini par céder au grand discours d’exaltation de la République et de ses valeurs. Un signe d’impuissance, comme il le reprochait alors à son prédécesseur ? A Palaiseau hier, dans l’enceinte de l’Ecole Polytechnique, le chef de l’Etat a cherché à se différencier de son aîné en soulignant qu’il «ne suffit pas de glorifier la République pour qu’elle demeure vivante». Et d’ajouter que «le plus grand danger qui menace notre modèle républicain, c’est que la République devienne une idéologie désincarnée».
Boursiers. Pour la revitaliser et lui donner un contenu concret, Nicolas Sarkozy a déballé un arsenal de mesures afin de favoriser la diversité sociale et ethnique. Il a aussi annoncé la nomination de Yazid Sabeg, un patron français d’origine berbère, comme «commissaire à la diversité et à l’égalité». A charge pour lui de mettre en œuvre le nouveau concept de «volontarisme républicain» du Président.
Dès 2009, Sarkozy souhaite que 25 % des places de chaque lycée préparant aux concours des grandes écoles soient réservées aux meilleurs élèves boursiers. Un taux qui devra atteindre 30 % dès 2010. Des «internats d’excellence» seront créés à leur intention. Les ministères sont eux aussi appelés à mettre le pied à l’étrier aux «jeunes de condition modeste» via les écoles de fonctionnaires qui leur sont attachées.
«Critère social». Pour contourner les très controversées questions des quotas et des statistiques ethniques, Nicolas Sarkozy a opté pour le «critère social». Selon lui, c’est par là «qu’il faut prendre le problème parce que les inégalités sociales englobent toutes les autres». Reprenant un thème cher à Jacques Chirac mais resté lettre morte, le président de la République a estimé qu’en «réduisant toutes les fractures sociales, on réduira du même coup toutes les fractures ethniques, religieuses et culturelles». Grâce à cette habileté, il espère s’éviter les accusations de favoriser le communautarisme tout en privant d’arguments ceux qui lui reprocheraient de pénaliser les Français «de souche», comme le dit Le Pen. En revanche, il est resté très flou sur la question des statistiques ethniques qui, selon certains, pourraient être utiles comme outil d’évaluation des discriminations à l’embauche ou dans le travail. «Si la question des statistiques pour mesurer les inégalités et les discriminations liées à l’origine est ouverte, la question d’une action publique volontariste fondée sur des critères ethniques ou religieux doit être close», a-t-il déclaré. A charge pour les scientifiques d’établir des «instruments de mesure dans le consensus pour mesurer si la politique qu’on engage produit des résultats».
Pour le reste, il a recyclé l’idée «d’expérimenter» les CV anonymes dans 100 grandes entreprises, disposition qui figure déjà dans la loi sur l’égalité des chances d’avril 2006 sans que les décrets d’application ne soient jamais publiés… Il a aussi proposé que les marchés publics d’Etat soient conditionnés à la mise en place d’actions favorables à la diversité par les entreprises. Pour elles et les administrations, un «label diversité» sera lancé début 2009. Enfin, les partis politiques, cancres de la diversité, pourraient voir leur financement «conditionné» en fonction des places éligibles accordées aux membres des minorités. Chiche ?"
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