Plusieurs gouvernements ont souhaité modifier le code du travail. Le motif évoqué le plus souvent, était la simplification d’un code difficile à mettre en œuvre tant les interprétations différentes, dues aux compilations des lois et de la jurisprudence, étaient nombreuses et sources de débats juridiques sans fin, souvent onéreux où seuls les spécialistes du droit faisaient de bonnes affaires.
François Hollande, pendant son quinquennat, avait chargé un ancien Garde des Sceaux de renommée incontestée, Robert Badinter, de réunir plusieurs experts afin de faire une proposition de simplification du code. Un projet a été élaboré, axé sur cinq ou six chapitres, ce projet traitait d’une manière simple et précise ce qui relevait de la loi, laissant au dialogue social une application concrète et négociée entre partenaires sociaux.
Ce projet de simplification restera en l’état.
La situation économique tendue, la recherche d’amélioration de la courbe du chômage ont de fait ajouté un autre débat. Le Medef considérant que la rigidité du code du travail était un facteur de ralentissement des embauches, souhaitait ardemment mettre en œuvre de la flexibilité dans le droit du travail.
Le gouvernement Vals a juste titre a engagé ce débat à l’Assemblée nationale créant une certaine effervescence animée par des syndicats CGT et FO en particulier arcs boutés sur des « acquis » reconnus mais en partie déconnectés de l’évolution de la réalité de l’entreprise du 21° siècle.
En effet, l’entreprise actuelle n’est plus essentiellement un lieu d’exploitation ou de conflits, c’est un lieu où chacun essaie de faire progresser l’ensemble. Bien sûr la situation est très souvent différente en fonction de la taille et ou du management instauré.
La rupture dans le dialogue social et à l’Assemblée s’est essentiellement forgée sur ce qu’on appelle l’inversion des normes autrement dit sur le fait qu’un accord d’entreprise pourrait avoir lieu même s’il était inférieur au droit défini par l’accord de branche. Une organisation syndicale la CFDT « dite progressiste » en comparaison sans doute avec celles qui restent bloquées sur des bases historiques respectables mais hors du contexte, a, tout en acceptant l’inversion des normes, fait évoluer le projet de loi obligeant que tout accord d’entreprise dérogatoire par rapport à la branche soit validé localement par des syndicats majoritaires dans l’entreprise.
La loi de réforme a été adoptée avec l’utilisation du 49-3, un petit groupe d’élus de la majorité parlementaire de gauche ayant refusé de voter pour ce texte.
Cette loi apportait un certain nombre d’avantages pour les salariés dont la reconnaissance de la pénibilité au travail favorisait la date de départ à la retraite pour les salariés concernés. Malheureusement dans le brouhaha de la contestation ces avantages n’ont pas obtenu l’écho qui leur revenait.
ET MAINTENANT
Dans sa campagne électorale et dans la campagne des législatives Emmanuel Macron a annoncé très clairement qu’il proposerait une nouvelle réforme du code du travail par ordonnance.
Fort de cette approbation par la population, le principe des ordonnances a été validé et des échanges bilatéraux se sont mis en place entre le ministre du travail et les organisations syndicales d’employeurs et de salariés.
Le contenu de ces ordonnances est distillé avec parcimonie pour ne pas dire avec prudence.
Le projet de réforme est élargi à de nombreux points du code du travail. Les principaux sont les suivants :
- articulation du droit entre la branche et l’entreprise
- institutions représentatives du personnel
- plafonnement des indemnités prud’homales
- périmètre de l’entreprise en cas de licenciement économique (France ou international)
- consultation des salariés dans l’entreprise et représentativité du personnel
-compte pénibilité
- travailleurs détachés
- travail dominical
- forme du contrat de travail
- gouvernance de l’entreprise.
A ce stade sachant que le 31 août le contenu de ces modifications devrait être connu, trois sujets essentiels de ce projet de réforme sont en question.
Quelle forme de dialogue social, dans la branche ou dans l’entreprise.
Quels moyens d’expression des salariés « expression syndicale privilégiée ou des salariés en direct ».
Quel contenu pour le contrat de travail. Quelles conditions en cas de rupture du contrat de travail (indemnité plafonnée ou non).
Ce qui est surprenant et dommageable est que cette réforme en profondeur du droit du travail ne soit pas précédée d’un débat concernant l’intérêt d’une réforme par rapport au bon fonctionnement de l’entreprise, à son développement, à la place et à la reconnaissance des salariés, à leur intérêt dans la réussite de l’entreprise et à la création d’emplois.
Ce débat a-t-il eu lieu, si oui, il est resté très discret et inaudible.
Non opposé à toutes réformes, mais désireux d’une avancée positive pour le développement économique et humain nous pensons que le dialogue social doit être le pilier de toutes évolutions et qu’il doit être construit et favorisé à tous les niveaux.
L’expression syndicale doit être privilégiée et renforcée à l’ensemble des salariés afin de choisir l’expression syndicale la plus adaptée au contexte économique changeant, mondialisé et instable. La branche professionnelle est sans doute l’échelon privilégié.
Le contrat de travail peut trouver une certaine flexibilité faut-il que les mêmes droits soient ouverts quelle qu’en soit la forme (droit au logement, droit aux prêts bancaires). A la flexibilité si elle s’avère nécessaire proposons de la flexi-sécurité. Un grand mot sur lequel nous reviendrons.
Avec cette réforme engagée nous poursuivrons le débat avec vous. Merci de vous y inscrire
En ce qui nous concerne nous vous ferons part au fur et à mesure des publications de nos réactions.
Daniel Delassalle